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Et d’abord, on a avancé que ''des végétaux de familles différentes pourraient bien ne pas puiser dans le sol les mêmes sucs nourriciers'', sans faire attention que les plantes les plus dissemblables absorbent indistinctement, avec l’eau, toutes les substances solubles qu’elle contient, lors même que ces substances peuvent nuire à leur existence, et que si, dans l’acte de la végétation, il se fait un choix des matières minérales tenues en dissolution ou en suspension dans le liquide séveux, ce ne peut être, ainsi que le démontrent des expériences positives, qu’à l’intérieur de la plante. — On a supposé aussi que ''la direction pivotante ou traçante des racines'' devait exercer une certaine influence en modifiant la profondeur à laquelle elles vont chercher la nourriture ; mais il est facile de comprendre que cette explication pourrait tout au plus s’appliquer à des plantes qui croîtraient simultanément à la même place, ou aux lieux où les labours ne mêlent pas sans cesse la masse du sol. — Lorsqu’on eut acquis la certitude que ''certains végétaux fatiguent la terre moins que d’autres'', les agronomes crurent avoir trouvé une explication satisfaisante du phénomène chimique de l’alternance ; toutefois fallut reconnaître qu’elle était encore incomplète ; car, si elle rendait suffisamment compte de l’appauvrissement plus ou moins grand du sol, elle laissait inexpliquée une partie des faits précités, et elle n’aidait en rien à reconnaître les causes de la difficulté marquée qu’éprouvent les végétaux même les moins épuisans à croître sur le terrain qui a fourni pendant longtemps à la végétation de leurs congénères. — Les cultivateurs sentaient bien que ce dernier effet, en quelque sorte accidentel, différait essentiellement de l’épuisement du sol qui réagit indistinctement dans toutes les circonstances et sur toutes les cultures. — Voici comment un de nos physiologistes les plus distingués a expliqué leur pensée.
Et d’abord, on a avancé que ''des végétaux de familles différentes pourraient bien ne pas puiser dans le sol les mêmes sucs nourriciers'', sans faire attention que les plantes les plus dissemblables absorbent indistinctement, avec l’eau, toutes les substances solubles qu’elle contient, lors même que ces substances peuvent nuire à leur existence, et que si, dans l’acte de la végétation, il se fait un choix des matières minérales tenues en dissolution ou en suspension dans le liquide séveux, ce ne peut être, ainsi que le démontrent des expériences positives, qu’à l’intérieur de la plante. — On a supposé aussi que ''la direction pivotante ou traçante des racines'' devait exercer une certaine influence en modifiant la profondeur à laquelle elles vont chercher la nourriture ; mais il est facile de comprendre que cette explication pourrait tout au plus s’appliquer à des plantes qui croîtraient simultanément à la même place, ou aux lieux où les labours ne mêlent pas sans cesse la masse du sol. — Lorsqu’on eut acquis la certitude que ''certains végétaux fatiguent la terre moins que d’autres'', les agronomes crurent avoir trouvé une explication satisfaisante du phénomène chimique de l’alternance ; toutefois fallut reconnaître qu’elle était encore incomplète ; car, si elle rendait suffisamment compte de l’appauvrissement plus ou moins grand du sol, elle laissait inexpliquée une partie des faits précités, et elle n’aidait en rien à reconnaître les causes de la difficulté marquée qu’éprouvent les végétaux même les moins épuisans à croître sur le terrain qui a fourni pendant longtemps à la végétation de leurs congénères. — Les cultivateurs sentaient bien que ce dernier effet, en quelque sorte accidentel, différait essentiellement de l’épuisement du sol qui réagit indistinctement dans toutes les circonstances et sur toutes les cultures. — Voici comment un de nos physiologistes les plus distingués a expliqué leur pensée.


'' « L’épuisement'' du sol a lieu lorsqu’un grand nombre de végétaux ont tiré d’un terrain donné toute la matière extractive, et l’''effritement'', lorsqu’un certain végétal détermine la stérilité du sol, soit pour les individus de même espèce que lui, soit pour ceux de même genre et de même famille, mais le laisse fertile pour d’autres végétaux.
« ''L’épuisement'' du sol a lieu lorsqu’un grand nombre de végétaux ont tiré d’un terrain donné toute la matière extractive, et l’''effritement'', lorsqu’un certain végétal détermine la stérilité du sol, soit pour les individus de même espèce que lui, soit pour ceux de même genre et de même famille, mais le laisse fertile pour d’autres végétaux.


» L’épuisement a lieu pour tous les végétaux quelconques : il agit en appauvrissant le sol, en lui enlevant la matière nutritive. L’effritement a quelque chose de plus spécifique ; il agit en corrompant le sol et en y mêlant, par suite de l’excrétion des racines, une matière dangereuse. Ainsi, un pêcher gâte le sol pour lui-même, à ce point que, si, sans changer de terre, on replante un pécher dans un terrain où il en a déjà vécu un autre auparavant, le second languit et meurt, tandis que tout autre arbre peut y vivre. Si le même arbre ne produit pas pour lui-même ce résultat, c’est que ses propres racines, allant toujours en s’allongeant, rencontrent sans cesse des veines de terre où elles n’ont pas encore déposé leur excrétion. On conçoit que ses propres excrétions doivent lui nuire à peu près comme si l’on forçait un animal à se nourrir de ses propres excrémens. Cette effet, dans l’un et l’autre exemple, n’est pas borné aux individus d’une même espèce mais les espèces analogues par leur organisation doivent souffrir, lorsqu’elles aspirent, par leurs racines, une matière rejetée par des êtres analogues à elles, tout comme un animal mammifère répugne à toucher aux excrémens d’un autre mammifère. On concevrait ainsi assez facilement pourquoi chaque plante tend à effriter le terrain pour ses congénères ; pourquoi certaines plantes à suc acre, comme les pavots ou les euphorbes, le détériorent pour la plupart des végétaux.
» L’épuisement a lieu pour tous les végétaux quelconques : il agit en appauvrissant le sol, en lui enlevant la matière nutritive. L’effritement a quelque chose de plus spécifique ; il agit en corrompant le sol et en y mêlant, par suite de l’excrétion des racines, une matière dangereuse. Ainsi, un pêcher gâte le sol pour lui-même, à ce point que, si, sans changer de terre, on replante un pécher dans un terrain où il en a déjà vécu un autre auparavant, le second languit et meurt, tandis que tout autre arbre peut y vivre. Si le même arbre ne produit pas pour lui-même ce résultat, c’est que ses propres racines, allant toujours en s’allongeant, rencontrent sans cesse des veines de terre où elles n’ont pas encore déposé leur excrétion. On conçoit que ses propres excrétions doivent lui nuire à peu près comme si l’on forçait un animal à se nourrir de ses propres excrémens. Cette effet, dans l’un et l’autre exemple, n’est pas borné aux individus d’une même espèce mais les espèces analogues par leur organisation doivent souffrir, lorsqu’elles aspirent, par leurs racines, une matière rejetée par des êtres analogues à elles, tout comme un animal mammifère répugne à toucher aux excrémens d’un autre mammifère. On concevrait ainsi assez facilement pourquoi chaque plante tend à effriter le terrain pour ses congénères ; pourquoi certaines plantes à suc acre, comme les pavots ou les euphorbes, le détériorent pour la plupart des végétaux.