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poëte dans ces instants sombres, pensant, avec Keats, que le principal but de la poésie consiste <c à être une amie qui adoucit les chagrins et élève les pensées de l’homme. »
J, SULLY. — LE PESSIMISME ET LA POÉSIE 399

poëte dans ces instants sombres, pensant, avec Keats, que le prin-
cipal but de la poésie consiste <c à être une amie qui adoucit les cha-
grins et élève les pensées de l'homme ».


Mais nous avons aussi souvent recours au poëte à cause du message
Mais nous avons aussi souvent recours au poëte à cause du message
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à lui, ne sommes-nous pas entraînés par une excitation plus forte que
à lui, ne sommes-nous pas entraînés par une excitation plus forte que
si, en un moment de bonheur tranquille, nous prenons un volume
si, en un moment de bonheur tranquille, nous prenons un volume
différent , uniquement pour entendre une seconde voix répéter notre
différent, uniquement pour entendre une seconde voix répéter notre
murmure de joyeux contentement 1 Nous pensons que le lecteur
murmure de joyeux contentement ? Nous pensons que le lecteur
reconnaîtra la vérité de cette assertion. En tant que les poètes sont
reconnaîtra la vérité de cette assertion. En tant que les poètes sont
recherchés, pour ainsi dire, comme des sources de sympathie, Il
recherchés, pour ainsi dire, comme des sources de sympathie, Il
semble assez certain que nous les apprécions davantage dans le
semble assez certain que nous les apprécions davantage dans le
chagrin que dans le contentement. C'est cette circonstance qui con-
chagrin que dans le contentement. C’est cette circonstance qui contribue à donner une si haute valeur poétique aux lamentations pessimistes. Que ce soit un poëte de profession comme Heine, ou un
écrivain comme Schopenhauer qui, sous le manteau de la prose,
tribue à donner une si haute valeur poétique aux lamentations pes-
simistes. Que ce soit un poëte de profession comme Heine, ou un
écrivain comme Schopenhauer qui, sous le manteau de la prose,
cache tant de vraie poésie, ces chants plaintifs nous attirent plus
cache tant de vraie poésie, ces chants plaintifs nous attirent plus
puissamment que ne pourraient le faire des concerts de louange.
puissamment que ne pourraient le faire des concerts de louange.


La raison de ce phénomène semble être que la satisfaction d'ac-
La raison de ce phénomène semble être que la satisfaction d’accorder et de recevoir de la sympathie ainsi que le sentiment de la
corder et de recevoir de la sympathie ainsi que le sentiment de la
fraternité humaine sont plus complets et plus intenses, si les émotions
fraternité humaine sont plus complets et plus intenses, si les émotions
partagées sont pénibles que si elles sont agréables. Le simple acte
partagées sont pénibles que si elles sont agréables. Le simple acte
d'exprimer la pitié semble produire un plaisir plus vif que celui de
d’exprimer la pitié semble produire un plaisir plus vif que celui de
présenter des félicitations, et entendre des paroles de condoléance
présenter des félicitations, et entendre des paroles de condoléance
occasionne un frémissement agréable que de simples congratulations
occasionne un frémissement agréable que de simples congratulations
ne sont pas capables de produire. Ainsi il arrive que nous éprouvons
ne sont pas capables de produire. Ainsi il arrive que nous éprouvons
un sentiment plus profond et plus intense de fraternité après avoir
un sentiment plus profond et plus intense de fraternité après avoir
partagé les mêmes douleurs qu'après avoir partagé les mêmes joies.
partagé les mêmes douleurs qu’après avoir partagé les mêmes joies.
On peut se demander pourquoi nous attachons ce prix particulier
On peut se demander pourquoi nous attachons ce prix particulier
au sentiment de fraternité dans le chagrin.
au sentiment de fraternité dans le chagrin.


Nous avons déjà fait allusion à une tendance organique spéciale
Nous avons déjà fait allusion à une tendance organique spéciale
qui nous pousse à manifester extérieurement notre douleur plutôt
qui nous pousse à manifester extérieurement notre douleur plutôt
que notre plaisir, à nous plaindre plutôt qu'à louer et à nous réjouir.
que notre plaisir, à nous plaindre plutôt qu’à louer et à nous réjouir.
11 semble raisonnable de supposer qu'en corrélation avec cette ten-
Il semble raisonnable de supposer qu’en corrélation avec cette tendance il y a des dispositions organiques spéciales à répondre aux
signes de la souffrance d’autrui par des expressions de sympathie et
dance il y a des dispositions organiques spéciales à répondre aux
de pitié<ref>La pitié n’est pas absolument identique à la sympathie pour la souffrance, mais il est inutile de les distinguer ici.</ref>, et que, d’un autre côté, ces dispositions se rattachent à
signes de la souffrance d'autrui par des expressions de sympathie et
un désir organique spécial d’obtenir ces signes de pitié de la part
de pitié *, et que, d'un autre côté, ces dispositions se rattachent à
des autres. En d’autres termes, on peut supposer que le {{tiret|frémisse|ment}}
un désir organique spécial d'obtenir ces signes de pitié de la part
des autres. En d'autres termes, on peut supposer que le frémisse*

1. La pitié n'est pas absolument identique à la sympathie pour la souiîranee,
mais il est inutile de les distinguer ici.

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