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expédient par lequel nous pouvons faire tomber l’argent au-dessous de son niveau, à mon avis aussi, le seul moyen de le porter au-dessus, est une pratique contre laquelle tout le monde s’écrieroit comme destructive ; c’est-à-dire, d’amasser des sommes considérables dans le trésor public, de les y enfermer, & d’en prévenir absolument la circulation. Le fluide ne communiquant pas avec l’élément voisin, peut, par un pareil artifice, être élevé à la hauteur qu’on veut lui donner.

Nos politiques modernes, par ce grand usage de papiers de crédit, embrassent l’unique méthode de bannir l’argent, & rejettent en même tems le seul moyen de l’augmenter ; c’est-à-dire, la pratique de l’entasser. C’est ce qui les oblige d’avoir recours à cent manœuvres qui ne servent qu’à arrêter l’industrie, & à nous priver, nous & nos voisins, des bénéfices communs de l’art & de la nature.

Plusieurs autres écrivains anglais, & des hommes d’état même, parmi lesquels on compte Milord Bolingbroke, ont pensé comme M. Hume, que la banque, & tous les effets par lesquels on remplace la monnoie, avoient le désavantage de nuire à l’accroissement de l’argent, & à la multiplicité des especes, tout en produisant néanmoins un renchérissement général.

Voyez les Réflexions de Bolingbroke sur l’état de l’Angleterre, après la paix de 1748.

Les écrivains françois les plus versés dans la connoissance de la banque, & de ses effets, n’ont pas une façon de penser différente de celle des écrivains anglois, dont il vient d’être question.

L’estimable auteur des Recherches sur les finances, ne semble approuver l’établissement d’une banque, que dans des cas d’épuisement. « Lorsque des profits énormes ont concentré les richesses dans un petit nombre de familles, est-il dit, (tom. 5, pag. 327), qu’une longue habitude de défiance a resserré l’argent & les denrées, que le sort de l’homme industrieux est plus fâcheux que celui de toute autre condition, la seule ressource consiste à présenter aux hommes, un crédit neuf & volontaire, qui devient une espece de centre de réunion ».

» Les banques marchandes & restreintes, sont l’expédient le plus naturel & le plus heureux qui ait encore été imaginé. Le fonds capital dont elles sont composes, commence par faire sortir de leur retraire une somme considérable de valeurs : les stipulations sont faites en especes dont le titre & le poids est invariablement fixé… Celui qui veut transporter au loin, une somme d’argent, & qui n’osoit prendre aucune lettre-de-change, ni se résoudre aux risques & à la dépense du transport de son argent, l’échange contre du papier qui sera reçu par-tout avec confiance… Les billets de la banque deviennent donc en un moment, par un accord unanime, le moyen terme le plus propre à faciliter le commerce.

» Dès que toutes les valeurs renfermées ont un motif pour rentrer en circulation, il est de l’intérêt de chaque propriétaire de les y remettre. L’industrie & le travail renaissent, le nombre des prêteurs augmente ; l’argent tombe de prix. Tel est l’effet général de toute banque ; mais on en pourroit distinguer trois sortes, dans l’exécution.

» Si les billets que donne la banque, étoient sans cesse compensés par une valeur numéraire, toujours existante dans la caisse, ils animeroient & soutiendroient la circulation, sans augmenter le prix des denrées, puisqu’ils seroient simplement la représentation, & non une multiplication de l’argent ; ce qui forme une banque restreinte.

» Mais toutes font valoir leur crédit ; elles en donnent un aux particulier ; soit sur des gages, soit sur leur réputation ; enfin, elles font valoir l’argent déposé, & leurs billets dans le commerce excedent la quantité d’argent existante dans la caisse… Alors il est clair qu’elles multiplient l’argent ou le signe des denrées, & qu’elles renchérissent le prix de toutes choses.

» Une troisieme espece de banque, est en même tems commerçante & politique ; c’est-à-dire, qu’elle sert tout-à-la-fois de dépôt ou de garant aux valeurs que l’on veut mettre dans le commerce, & qu’elle fournit des secours à l’état. Alors une partie des dettes que contracte le gouvernement, se trouve circuler, comme feroit une somme d’argent introduite par le commerce étranger. Elle a les mêmes effets au-dedans… Mais étant difficile de ne pas abuser de l’extrême facilité de dépenser, l’était multiplie sans cesse ses obligations avec la banque, sans jamais songer à les acquitter. La situation des affaires paroît heureuse & tranquille ; cependant la fermentation des humeurs accumulées dans le corps politique, le ravage & le bouleverse ».

L’Esprit des loix, tom. 2, in-12, pag. 251, présente aussi, sur les banques, des réflexions qui trouvent naturellement ici leur place.

Dans les états qui font le commerce d’économie, on a heureusement établi des banques, qui, par leur crédit, ont formé de nouveaux signes des valeurs ; mais on auroit tort de les transporter dans les états qui font le commerce de luxe.

Les mettre dans des pays gouvernés par un seul, c’est supposer l’argent d’un côté, & la puissance de l’autre, c’est-à-dire, la faculté de tout avoir, sans aucun pouvoir, & de l’autre le pouvoir, avec la faculté de rendre tout.

Un autre écrivain, également du premier ordre, & dont l’opinion est du plus grand poids dans cette matiere, fait sentir tous les dangers d’une banque publique, dans l’éloge de Colbert.

Si la somme d’argent qui existe en différens