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et sciences propagées, lumière allumée sur tous les sommets, aide à toutes les
et sciences propagées, lumière allumée sur tous les sommets, aide à toutes les misères, promulgation de tous les principes, la Convention le faisait, ayant dans les entrailles cette hydre, la Vendée, et sur les épaules ce tas de tigres, les rois.
misères, promulgation de tous les principes, la Convention le faisait, ayant
dans les entrailles cette hydre, la Vendée, et sur les épaules ce tas de tigres,
les rois.


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Lieu immense. Tous les types humains, inhumains et surhumains étaient là. Amas épique d’antagonismes. Guillotin évitant David, Bazire insultant Chabot, Guadet raillant Saint-Just, Vergniaud dédaignant Danton, Louvet attaquant Robespierre, Buzot dénonçant Égalité, Chambon flétrissant Pache, tous exécrant Marat. Et que de noms encore il faudrait enregistrer ! Armonville, dit Bonnet-Rouge, parce qu’il ne siégeait qu’en bonnet phrygien, ami de Robespierre, et voulant, « après Louis {{rom-maj|xvi|16}}, guillotiner Robespierre » par goût de l’équilibre ; Massieu, collègue et ménechme de ce bon Lamourette, évêque fait pour laisser son nom à un baiser ; Lehardy du Morbihan stigmatisant les prêtres de Bretagne ; Barère, l’homme des majorités, qui présidait quand Louis {{rom-maj|xvi|16}} parut à la barre, et qui était à Paméla ce que Louvet était à Lodoïska ; l’oratorien Daunou qui disait : ''Gagnons du temps'' ; Dubois de Crancé à l’oreille de qui se penchait Marat ; le marquis de Chateauneuf, Laclos, Hérault de Séchelles qui reculait devant Henriot criant : ''Canonniers, à vos pièces !'' Julien, qui comparait la Montagne aux Thermopyles ; Gamon, qui voulait une tribune publique réservée uniquement aux femmes ; Laloy, qui décerna les honneurs de la séance à l’évêque Gobel venant à la Convention déposer la mitre et coiffer le bonnet rouge ; Lecomte, qui s’écriait : ''C’est donc à qui se déprêtrisera !'' Féraud, dont Boissy-d’Anglas saluera la tête, laissant à l’histoire cette question : — Boissy-d’Anglas a-t-il salué la tête, c’est-à-dire la victime, ou la pique, c’est-à-dire les assassins ? — Les deux frères Duprat, l’un montagnard, l’autre girondin, qui se haïssaient comme les deux frères Chénier.
Lieu immense. Tous les types humains, inhumains et surhumains étaient là. Amas
épique d’antagonismes.
Guillotin évitant David, Bazire insultant Chabot, Guadet raillant Saint-Just,
Vergniaud dédaignant Danton, Louvet attaquant Robespierre, Buzot dénonçant
Égalité, Chambon flétrissant Pache, tous exécrant Marat. Et que de noms encore
il faudrait enregistrer ! Armonville, dit Bonnet-Rouge, parce qu’il ne siégeait
qu’en bonnet phrygien, ami de Robespierre, et voulant, « après Louis XVI,
guillotiner Robespierre » par goût de l’équilibre ; Massieu, collègue et
ménechme de ce bon Lamourette, évêque fait pour laisser son nom à un baiser ;
Lehardy du Morbihan stigmatisant les prêtres de Bretagne ; Barère, l’homme des
majorités, qui présidait quand Louis XVI parut à la barre, et qui était à Paméla
ce que Louvet était à Lodoïska ; l’oratorien Daunou qui disait : ''Gagnons du temps'' ; Dubois-Crancé à l’oreille de qui se penchait Marat ; le marquis de
Chateauneuf, Laclos, Hérault de Séchelles qui reculait devant Henriot criant :
''Canonniers, à vos pièces !'' Julien, qui comparait la Montagne aux Thermopyles ;
Gamon, qui voulait une tribune publique réservée uniquement aux femmes ; Laloy,
qui décerna les honneurs de la séance à l’évêque Gobel venant à la Convention
déposer la mitre et coiffer le bonnet rouge ; Lecomte, qui s’écriait :
''C’est donc à qui se déprêtrisera !'' Féraud, dont Boissy-d’Anglas saluera la tête,
laissant à l’histoire cette question : — Boissy-d’Anglas a-t-il salué la tête,
c’est-à-dire la victime, ou la pique, c’est-à-dire les assassins ? — Les deux
frères Duprat, l’un montagnard, l’autre girondin, qui se haïssaient comme les
deux frères Chénier.


Il s’est dit à cette tribune de ces vertigineuses paroles qui ont, quelquefois, à l’insu même de celui qui les prononce, l’accent fatidique des révolutions, et à la suite desquelles les faits matériels paraissent avoir brusquement on ne sait quoi de mécontent et de passionné, comme s’ils avaient mal pris les choses qu’on vient d’entendre ; ce qui se passe semble courroucé de ce qui se dit ; les catastrophes surviennent furieuses et comme exaspérées par les paroles des hommes. Ainsi une voix dans la montagne suffit pour détacher l’avalanche. Un mot
Il s’est dit à cette tribune de ces vertigineuses paroles qui ont, quelquefois,
de trop peut être suivi d’un écroulement. Si l’on n’avait pas parlé, cela ne serait pas arrivé. On dirait parfois que les événements sont irascibles.
à l’insu même de celui qui les prononce, l’accent fatidique des révolutions, et
à la suite desquelles les faits matériels paraissent avoir brusquement on ne
sait quoi de mécontent et de passionné, comme s’ils avaient mal pris les choses
qu’on vient d’entendre ; ce qui se passe semble courroucé de ce qui se dit ; les
catastrophes surviennent furieuses et comme exaspérées par les paroles des
hommes. Ainsi une voix dans la montagne suffit pour détacher l’avalanche. Un mot
de trop peut être suivi d’un écroulement. Si l’on n’avait pas parlé, cela ne
serait pas arrivé. On dirait parfois que les événements sont irascibles.