« Page:Bacon - Œuvres, tome 4.djvu/2 » : différence entre les versions

mAucun résumé des modifications
mAucun résumé des modifications
Contenu (par transclusion) :Contenu (par transclusion) :
Ligne 24 : Ligne 24 :
{{AN|{{Refa|12|*12}}{{Em}}Quand un principe, ou, ce qui est la même chose, une règle est trop générale, comme alors son énoncé embrasse les cas mêmes où elle n’a pas lieu et qu’elle auroit dû laisser hors de ses limites, chacun de ces cas fait exception à la règle et force à la limiter après coup en excluant ces cas. Mais si la règle en se limitant d’avance elle-même annonce ses exceptions, alors ces exceptions ne l’attaquent plus et ne font que prouver ce qu’elle avoit dit. Ainsi, le moyen le plus sûr pour ne jamais donner prise, soit dans la conversation, soit dans les livres même en avançant des opinions positives, c’est de particulariser beaucoup, et de joindre à la plupart des principes qu’on pose, des règles qu’on énonce, ces expressions modificatives et restrictives : ''souvent, presque toujours, communément, rarement, toutes choses égales, entre certaines limites, etc''. et d’adoucir ses affirmations, en proportion qu’on renforce ses preuves ; de joindre à des prémisses évidentes ou très probables de modestes conclusions. {{br0}}{{Em}}Mais dira-t-on, si la règle (ou le principe) a des exceptions, chaque cas qui se présente peut en être une. On n’est donc jamais certain dans la théorie de saisir la vérité en se conformant aux principes, ni d’atteindre au but, dans la pratique en suivant la règle. Je réponds que cela n’est pas certain, mais du moins très probable, quand la règle est un peu générale. Et alors la probabilité de réussir, en observant la règle est à la probabilité de ne pas réussir, en la suivant, ou de réussir en ne la suivant pas, comme le nombre des cas qui rentrent dans la règle est au nombre des cas qui n’y rentrent pas. Or, l’expérience même prouve qu’en se fiant aux raisonnemens nécessaires pour distinguer les cas qui font exception de ceux qui rentrent dans la règle, on tombe dans une infinité d’erreurs, soit pour n’avoir pas fait entrer dans ces raisonnement toutes les considérations nécessaires, soit pour avoir posé quelque principe faux, soit enfin pour avoir tiré de principes vrais, des conséquences fausses et les méprises auxquelles on s’expose en voulant faire toutes ces distinctions, sont en beaucoup plus grand nombre que les erreurs qu’on peut commettre en observant constamment la règle, et méprisant courageusement toutes les exceptions : ainsi la prudence veut que l’on se tienne constamment attaché aux règles (ou aux principes) sinon dans les cas où l’exception est bien marquée et sensible pour les plus foibles vues, c’est-à-dire, dans ceux où la cause énoncée par le principe, ou, ce qui est la même chose le moyen indiqué par la règle est visiblement à son minimum, tandis que la cause contraire est à son maximum. Aussi l’expérience, parfaitement d’accord avec le raisonnement, prouve-t-elle que ceux qui demeurent constamment attachés à des principes, a des règles, à des systèmes, à des plans, même d’une bonté médiocre, sont ordinairement plus heureux dans leurs entreprises que ceux qui, ne sachant pas négliger les petites erreurs et les petite doutes, flottent perpétuellement entre les principes, les règles, les systèmes, ou les plans opposés.
{{AN|{{Refa|12|*12}}{{Em}}Quand un principe, ou, ce qui est la même chose, une règle est trop générale, comme alors son énoncé embrasse les cas mêmes où elle n’a pas lieu et qu’elle auroit dû laisser hors de ses limites, chacun de ces cas fait exception à la règle et force à la limiter après coup en excluant ces cas. Mais si la règle en se limitant d’avance elle-même annonce ses exceptions, alors ces exceptions ne l’attaquent plus et ne font que prouver ce qu’elle avoit dit. Ainsi, le moyen le plus sûr pour ne jamais donner prise, soit dans la conversation, soit dans les livres même en avançant des opinions positives, c’est de particulariser beaucoup, et de joindre à la plupart des principes qu’on pose, des règles qu’on énonce, ces expressions modificatives et restrictives : ''souvent, presque toujours, communément, rarement, toutes choses égales, entre certaines limites, etc''. et d’adoucir ses affirmations, en proportion qu’on renforce ses preuves ; de joindre à des prémisses évidentes ou très probables de modestes conclusions. {{br0}}{{Em}}Mais dira-t-on, si la règle (ou le principe) a des exceptions, chaque cas qui se présente peut en être une. On n’est donc jamais certain dans la théorie de saisir la vérité en se conformant aux principes, ni d’atteindre au but, dans la pratique en suivant la règle. Je réponds que cela n’est pas certain, mais du moins très probable, quand la règle est un peu générale. Et alors la probabilité de réussir, en observant la règle est à la probabilité de ne pas réussir, en la suivant, ou de réussir en ne la suivant pas, comme le nombre des cas qui rentrent dans la règle est au nombre des cas qui n’y rentrent pas. Or, l’expérience même prouve qu’en se fiant aux raisonnemens nécessaires pour distinguer les cas qui font exception de ceux qui rentrent dans la règle, on tombe dans une infinité d’erreurs, soit pour n’avoir pas fait entrer dans ces raisonnement toutes les considérations nécessaires, soit pour avoir posé quelque principe faux, soit enfin pour avoir tiré de principes vrais, des conséquences fausses et les méprises auxquelles on s’expose en voulant faire toutes ces distinctions, sont en beaucoup plus grand nombre que les erreurs qu’on peut commettre en observant constamment la règle, et méprisant courageusement toutes les exceptions : ainsi la prudence veut que l’on se tienne constamment attaché aux règles (ou aux principes) sinon dans les cas où l’exception est bien marquée et sensible pour les plus foibles vues, c’est-à-dire, dans ceux où la cause énoncée par le principe, ou, ce qui est la même chose le moyen indiqué par la règle est visiblement à son minimum, tandis que la cause contraire est à son maximum. Aussi l’expérience, parfaitement d’accord avec le raisonnement, prouve-t-elle que ceux qui demeurent constamment attachés à des principes, a des règles, à des systèmes, à des plans, même d’une bonté médiocre, sont ordinairement plus heureux dans leurs entreprises que ceux qui, ne sachant pas négliger les petites erreurs et les petite doutes, flottent perpétuellement entre les principes, les règles, les systèmes, ou les plans opposés.
}}
}}

{{AN|{{Refa|13|*13}}{{Em}}L’auteur emploie ici le mot d’''instances'' ; mais ce terme nous paroît trop général. Une ''instance'' est une ''allégation'' en ''surcroît de preuve'' positive ou négative. Or, il est bien des espèces d’''allégations'', telles que ''faits'' ou ''exemples'', ''autorités'', ''comparaisons'', ''principes positifs'', ''définitions'', ''preuves per absurdum'', ''etc''. Comme il s’agit ici de ''faits'' et d’''exemples'', nous ferons usage de ces deux derniers mots et nous les emploieront alternativement, soit pour éviter la monotonie, soit pour n’être pas obligés de nous exprimer ainsi : On ''trouve un exemple de telle espèce d’exemples dans tels animaux''.}}
</div>
</div>