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par ce qu’on dit et par ce qu’on ne dit pas, par ce que les observateurs désintéressés et clairvoyans peuvent y chercher et y trouver.
par ce qu’on dit et par ce qu’on ne dit pas, par ce que les observateurs désintéressés et clairvoyans peuvent y chercher et y trouver. Elle est pleine de révélations à peine déguisées, d’aveux significatifs et presque involontaires. Elle est menée rapidement, un peu au pas de charge, avec l’intention évidente de ne pas créer trop de difficultés, de refaire un certain ordre financier en commençant par la suppression des budgets extraordinaires, par cette unification du budget qui est le trait le plus caractéristique des projets ministériels et parlementaires. On se heurte de temps à autre, il est vrai, à quelque vote de fantaisie comme cet ordre du jour improvisé, platonique et puéril qui invite le gouvernement à méditer et à préparer des réformes démocratiques dans le système financier. D’un autre côté, on n’est pas encore arrivé aux défilés les plus périlleux, aux recettes, aux impôts nouveaux, à l’emprunt, aux taxes imposées, par interprétation, aux congrégations religieuses. Jusqu’ici, néanmoins, il est certain qu’un esprit assez nouveau de mesure et de prudence règne dans ces débats. M. le ministre des affaires étrangères, en défendant son budget d’une parole aisée, a pu, sans embarras, faire sentir le danger de l’incohérence dans notre diplomatie, et même avouer son intérêt pour nos missions, pour nos écoles catholiques d’Orient ; il aurait demandé sur l’heure quelques crédits de plus, on les lui aurait accordés. La suppression de l’ambassade française auprès du Vatican n’a trouvé cette fois, pour la défendre, qu’un obscur loustic de pharmacie rurale, qui n’a eu d’autre succès que de ruiner sa motion par le ridicule de ses banalités, venant tout droit de Yonville-l’Abbaye, séjour du célèbre M. Homais ! Le budget des cultes est passé sans contestation, offrant à M. le ministre Fallières, comme à M. le rapporteur de la commission parlementaire, une occasion de témoigner quelques intentions conciliatrices. Quant à M. le ministre de l’intérieur, il n’a eu qu’un mot à dire, de son ton dégagé, pour sauver ses fonctionnaires et ses fonds secrets. Les républicains, sans désarmer, ont visiblement gardé une certaine réserve ; les conservateurs, sans suspendre leurs hostilités, ont mesuré leurs coups, et à travers tout, on sent que dans ces affaires de budget, comme dans le reste, la vraie question qui s’agite est toujours celle d’une politique nouvelle autour de laquelle pourrait se rallier une majorité, force et appui d’un gouvernement de transaction libérale et de modération. C’est le fond de tout ce qui se dit, de tout ce qui se fait depuis un an, depuis cette crise, d’où la France est sortie par un mouvement spontané de bon sens que M. le ministre de l’intérieur plus que tout autre a peut-être un peu aidé. Tout reste indécis tant que cette première question n’est pas résolue, et cette question même ne sera pas résolue, tant qu’on tournera dans ce cercle inextricable où est pour le moment le vrai nœud des affaires françaises. Les républicains, même
Elle est pleine de révélations à peine déguisées, d’aveux significatifs et presque involontaires. Elle est menée rapidement, un peu
au pas de charge, avec l’intention évidente de ne pas créer trop
de difficultés, de refaire un certain ordre financier en commençant par la suppression des budgets extraordinaires, par cette unification du budget qui est le trait le plus caractéristique des projets ministériels et parlementaires. On se heurte de temps à autre,
il est vrai, à quelque vote de fantaisie comme cet ordre du jour
improvisé, platonique et puéril qui invite le gouvernement à méditer
et à préparer des réformes démocratiques dans le système financier.
D’un autre côté, on n’est pas encore arrivé aux défilés les plus périlleux, aux recettes, aux impôts nouveaux, à l’emprunt, aux taxes imposées, par interprétation, aux congrégations religieuses. Jusqu’ici, néanmoins, il est certain qu’un esprit assez nouveau de mesure et de
prudence règne dans ces débats. M. le ministre des affaires étrangères, en défendant son budget d’une parole aisée, a pu, sans embarras, faire sentir le danger de l’incohérence dans notre diplomatie, et
même avouer son intérêt pour nos missions, pour nos écoles catholiques d’Orient; il aurait demandé sur l’heure quelques crédits de
plus, on les lui aurait accordés. La suppression de l’ambassade française auprès du Vatican n’a trouvé cette fois, pour la défendre, qu’un
obscur loustic de pharmacie rurale, qui n’a eu d’autre succès que de
ruiner sa motion par le ridicule de ses banalités, venant tout droit de
Yonville-l’Abbaye, séjour du célèbre M. Homais ! Le budget des cultes
est passé sans contestation, offrant à M. le ministre Fallières, comme
à M. le rapporteur de la commission parlementaire, une occasion de
témoigner quelques intentions conciliatrices. Quant à M. le ministre
de l’intérieur, il n’a eu qu’un mot à dire, de son ton dégagé, pour
sauver ses fonctionnaires et ses fonds secrets. Les républicains, sans
désarmer, ont visiblement gardé une certaine réserve; les conservateurs, sans suspendre leurs hostilités, ont mesuré leurs coups, et à
travers tout, on sent que dans ces affaires de budget, comme dans le
reste, la vraie question qui s’agite est toujours celle d’une politique
nouvelle autour de laquelle pourrait se rallier une majorité, force et
appui d’un gouvernement de transaction libérale et de modération.

C’est le fond de tout ce qui se dit, de tout ce qui se fait depuis un
an, depuis cette crise, d’où la France est sortie par un mouvement
spontané de bon sens que M. le ministre de l’intérieur plus que tout
autre a peut-être un peu aidé. Tout reste indécis tant que cette première question n’est pas résolue, et cette question même ne sera pas
résolue, tant qu’on tournera dans ce cercle inextricable où est pour le
moment le vrai nœud des affaires françaises. Les républicains, même