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tune, je manquai le plus beau rhinocéros que j’aie vu. Il était enfoncé jusqu’à mi-corps dans un trou vaseux, me tournait le dos, rien ne m’empêchait de lui envoyer une balle, mais après ma déconfiture je ne voulais plus agir qu’avec certitude ; et pendant que je prenais mes précautions, mon rhinocéros décampa, ne me laissant d’autre alternative que de le tirer dans la culotte, ce qui est complétement inutile. Enfin, je m’étais perdu et n’arrivai que trois heures après la nuit close, guidé par les cris de mes hommes.

Chasser à pied la grosse bête, le faire avec succès, est une science complète et demande beaucoup d’adresse : il faut reconnaître le pays, en relever les moindres détails, étudier le vent avec une exactitude rigoureuse ; si l’on est vu des animaux, il faut suivre la direction contraire à celle qu’ils ont prise, remarquer l’endroit où ils se trouvent, s’en rapprocher peu à peu en décrivant un cercle, sans jamais s’arrêter pour les regarder, à moins qu’on ne soit parfaitement à couvert. On ne saurait y mettre assez de patience ; j’ai entendu dire à un vieux chasseur que lorsque dans sa journée, il était parvenu à tuer une pièce, il était satisfait. C’est le lever du soleil qui est l’heure la plus favorable pour commencer la chasse ; et un bon télescope est d’un immense secours.

Au moment de clore ce chapitre, je tiens à raconter quelques aventures qui me sont arrivées à propos de buffles pendant que j’étais chez les Zoulous.

Un soir je revenais au camp, après avoir fait une bonne journée : trois caamas, un élan, un buffle mâle. J’avais en main une belle jument grise, chargée de la dépouille des caamas, lorsque j’aperçus en face de moi une bête énorme, tellement enfoncée dans la vase, que je la pris pour un rhinocéros. Je lâchai la jument et courus derrière elle, de manière à n’être pas vu. Il se trouva que l’animal en question était un grand buffle, qui, pour premier avis de ma présence, reçut une balle dans les côtes.

Je ne dirai pas comment il fit voler les pierres sur sa route, et avec quel fracas il descendit la montagne. Je rechargeai mon fusil, vins retrouver la jument, qui était toujours au même endroit (tout cheval sud-africain dressé pour la chasse, attend son maître une demi-journée, s’il le faut), et je suivis la direction que le buffle avait prise, sans toutefois espérer de le revoir, car la nuit arrivait.

Tout à coup j’entrevis à l’ombre d’un mimosa une masse informe qui s’avançait vers moi. Je cherchai du regard un arbre qui pût me donner asile ; je pensai à bondir sur le dos de la jument ; il n’y avait pas moyen, en raison des peaux dont elle était chargée. Mon bras était passé dans la bride ; le buffle avançait, je mis le fusil à l’épaule ; la jument s’effraya, fit un bond en arrière, la balle frappa l’ennemi à la poitrine sans le détourner le moins du monde.

De plus en plus terrifiée, la jument se cabra, perdit l’équilibre, retomba sur le dos et m’entraîna dans sa chute ; le buffle, passant au-dessus de nous, enleva de son sabot la paupière de ma bête et poursuivit sa course. Je le retrouvai à deux cents pas, où il était mort de ma seconde balle, qui l’avait frappé en pleine poitrine.

Un autre jour, sur les bords du Pongola, nous vîmes un troupeau de buffles ; mes compagnons me supplièrent de leur tuer une femelle grasse. Je me rendis dans une grande plaine, qui se trouvait entre la bande et le hallier qui lui servait de retraite, et me cachai derrière un petit buisson, placé contre le vent. J’étais armé de deux fusils à coup double, et je dis à ceux qui m’accompagnaient de faire le tour, afin de me renvoyer la troupe. Dès qu’elles eurent flairé mes rabatteurs, les trois cents bêtes, dont elle pouvait se composer, arrivèrent droit à moi, d’un trot peu rapide, mais qui faisait trembler le sol et soulevait un nuage de poussière.

J’étais couché au ras de la plaine, comme un lièvre dans sa forme ; pour seul abri, j’avais ce petit buisson


Attendant que la sentinelle de la troupe eût disparu.


de trois pieds de haut et de quatre pieds de circonférence. Lorsque les chefs de la bande, n’étant plus qu’à trois longueurs, menacèrent de me passer sur le corps, je bondis aussi haut que possible en jetant un cri effroyable. Le troupeau tout entier s’arrêta comme frappé de stupeur, et resta cloué sur place pendant quinze ou vingt secondes. Je visai une femelle au poil luisant, aux formes arrondies, et j’appuyai sur la détente. Jamais je n’ai produit une pareille commotion. Je fus assourdi par le torrent, aveuglé par la poussière. C’est à peine si je saisis la détonation des trois coups que je tirai au milieu du nuage.

Quand ce voile poudreux se fut éclairci, j’aperçus, à trois cents mètres, la bande qui détalait, poursuivie par Smoke, ma petite chienne favorite. Cette dernière eut bientôt séparé de la troupe la femelle que j’avais blessée, la conduisit à un mille du point de départ, et ne la quitta qu’après l’avoir vue mourir. Smoke revint alors près de moi ; tandis que nous cherchions à retrouver la piste sanglante, elle se mit à trotter devant nous, et arriva