Shidda
SHIDDAADORE LE BOUDDHA POUR SHIDDA
PAROLE DE RECOMMANDATION. |
SHIDDA
Le manuscrit traduit par MM. Ymaïzoumi et Yamata a été donné à M. Émile Guimet, à son passage à Nagoya, par le grand prêtre du temple de Tchohédji. Ce bonze, d’un âge fort avancé, avait été signalé au voyageur par les prêtres de Nikko et d’autres prêtres bouddhistes, comme étant très versé dans les mystères de la religion. Il offrit le manuscrit en disant qu’il l’avait fait copier par un de ses anciens élèves, qui ne s’était pas montré digne de ses enseignements, et, avant de remettre le livre, il effaça avec son pinceau le nom de son disciple qui figurait au verso de la couverture.
Shidda est un mot sanscrit qui signifie « perfection ». On a donné ce nom à l’ensemble des caractères sanscrits pour indiquer qu’ils sont perfectionnés de manière à pouvoir exprimer toutes les idées sans qu’on ait besoin de recourir à un autre caractère. C’est pour cette raison que, en Chine et au Japon, on n’appelle pas l’ensemble de ces caractères « sanscrit », mais bien shiddun, qui est l’accusatif de la déclinaison de shidda, d’après la grammaire sanscrite.
La parole de recommandation : « Adore le Bouddha pour Shidda », veut donc dire ; « Adore le Bouddha pour Shidda qu’il a créé. »
Les vieux manuscrits sanscrits apportés de l’Inde et de la Chine au Japon, sont écrits avec ces caractères.
Première explication donnée par le Bouddha.
Suivant un ouvrage intitulé : Djimoshakou (explication des caractères sanscrits), écrit par Kooboo-Daïshi, il n’y avait ni loi ni religion au commencement de la création du monde. Brahama descendit du ciel dans ce monde et créa les quarante-sept caractères dont la modification peut donner naissance à plus de dix mille autres.
Le sanscrit transmis jusqu’à nos jours, dont la prononciation est celle des Indes méridionales, a été défini d’après un ouvrage fait par Tchikô, prêtre chinois, et intitulé Djiki (explication des caractères).
Deuxième explication donnée par Shakamouni.
Les livres sacrés de Shakamouni expliquent les différents sens des caractères sanscrits. Ce sont ces sens des caractères qui, dit-on, ont été admis dans les Cinq Indes, c’est-à-dire l’Inde orientale, l’Inde occidentale, l’Inde méridionale, l’Inde septentrionale et l’Inde centrale.
Le livre sacré intitulé : Mondjoumon, qui contient les sermons que prononça Shakamouni pendant les sept premiers jours qui suivirent sa pénitence, explique les différents sens des cinquante caractères ; un autre livre, intitulé Kégonkio, explique également les divers sens des quarante-deux caractères.
Troisième explication transmise par le Monde des Dragons[1].
Cinq siècles après la mort de Shakamouni, la secte Shôdjiokîo (nom de trois des cinq sectes principales de la religion de Shakamouni) se trouvait dans un état prospère. À cette époque, plusieurs livres de la secte daïdjiô (nom de deux des cinq principales sectes de la religion de Shakamouni) avaient été introduits, on ignore par quel moyen, dans le Monde des Dragons. Sept siècles après la mort de Shakamouni, un prêtre indien nommé Riou-Miô-Bossatsou[2] alla dans le Monde des Dragons et en rapporta tous les livres qui avaient été introduits dans ledit monde : il régénéra ainsi la secte de daïdjiô. Ces livres renferment quatre caractères nouveaux. Tchikô rapporte que les Indes centrales employèrent les caractères créés par Brahama, en y ajoutant ces quatre signes.Quatrième explication donnée par Daï-Niti, Bouddha éternel.
Daï-Niti et ceux qui possédèrent la même étendue d’esprit que lui ont expliqué le sens mystique des caractères sanscrits. En effet, le sens mystique de ces caractères est clairement expliqué dans le chapitre de Shakoudjimohon du livre intitulé Kongôtchogniô, et dans les chapitres de Gou en cingombon et de Djirimbon, etc., du livre sacré de Daï-Niti.
ma | ta |
Le mot mata, est le nom générique des voyelles. Toutes ces voyelles, après avoir été modifiées, sont employées comme signes qui s’ajoutent à un caractère pour lui donner un son autre que le sien propre.
अ | a | Éternité, passion. | |
आ | â | Tranquilité, état calme, solitude. | |
इ | i | Commencement, origine, source. | |
ई | î | Accident, fâcheux. |
उ | u | Figuré. | |
ऊ | û | Diminution, dommage, déchet, perte. | |
ए | ê | Désir. | |
ऐ | ae | Puissance. | |
ओ | ô | Cascade, état des choses qui ne s’arrêtent pas même un instant. | |
औ | ao | Modification, changement, transformation. | |
अं | au | Limite, borne, Buddhi (mot sanscrit), c’est-à-dire l’état d’esprit où l’on se trouve avant d’égaler Bouddha. | |
अः | ah | Éloignement, écartement, Nirvâna (mot à mot) : sans passion. |
ऋ | ri | Miracle. | |
ॠ | rî | Exemple, espèce. | |
ऌ | li | Action d’appliquer l’esprit. | |
ॡ | lî | Action de se plonger. |
Ces quatre voyelles particulières sont des signes qu’un auteur de l’orthographe de la langue sanscrite créa ou admit postérieurement à la création des caractères sanscrits par Brahama. Ce sont les quatre caractères sanscrits transmis par le Monde des Dragons ; ils s’ajoutent aux autres signes pour l’euphonie.
On ne connaît pas bien positivement le nom de l’auteur en question ; mais, suivant les remarques du livre intitulé Néhankiô, cet auteur serait Souva-Varna, prêtre indien professant une autre religion que le bouddhisme, et il aurait enseigné pour la première fois ces quatre voyelles à Vatavaha, roi des Indes, pour corriger la difficulté qu’il avait de prononcer certaines lettres.
Un missionnaire indien en Chine, nommé Hôgatsou-Sanzo, disait que ces quatre caractères s’employaient dans le style élevé comme lettres euphoniques.
Les douze premiers caractères s’employaient dans la langue vulgaire ; les quatre derniers étaient usités particulièrement dans le style élevé. Ainsi, dans le dictionnaire fait par Erïn, prêtre chinois, ces quatre caractères ont reçu le nom de « sons auxiliaires, sons d’élégance ». Il y est dit que ces quatre caractères, ou voyelles, ne s’employaient pas pour former le son, comme les autres voyelles.
क | ka | Action. | |
ख | kà | Chaos. | |
ग | ga | Conduite. | |
घ | gà | Réunion. | |
ङ | nga | Séparation. | |
च | ça | Déplacement. | |
छ | çä | Ombre. |
ज | ja | Naissance, production. | |
झ | jà | Ennemi, guerre. | |
ञ | ñâ | Intelligence. | |
ट | ṭa | Orgueil, présomption. | |
ठ | ṭà | Soin, entretien. | |
ड | ḍa | Haine. | |
ढ | ḍà | Persistance. | |
ण | ṇa | Dispute. | |
त | ta | Identité. | |
थ | tà | Demeure. | |
द | da | Donner l’aumône. | |
ध | dà | Loi, monde. | |
न | na | Nom. | |
प | pa | Vérité incontestable. | |
फ | pà | Instabilité. | |
ब | ba | Être lié. | |
भ | bà | Matière. | |
म | ma | Moi, partialité. |
Ces trente-cinq caractères sont appelés consonnes, corps de caractères, mètres de caractères. En se combinant avec mata, c’est-à-dire avec les douze caractères précédemment cités, ils donnent naissance au son. C’est pour cette raison qu’ils sont ainsi nommés.
य | ya | Doctrine. | |
र | rà | Poussière, tache, souillure, sale. | |
ल | la | Forme. | |
व | va | Parole. | |
श | ca | Esprit calme. | |
ष | sha | Caractère mou, mollesse. | |
स | sa | Raison incontestable. | |
ह | ha | Cause. |
Règle de la combinaison de deux mêmes caractères. Exemple :
Ces deux caractères forment le caractère suivant :
ल्ल | llan | Suppression. |
Règle de la combinaison de deux caractères différents. Exemple :
Ces deux signes en se combinant forment le suivant :
क्ष | ksha | Épuisement. |
ा |
â | |
ि |
i | |
ी |
î |
ु |
u | |
ू |
û |
े |
ê | |
ै |
ae | |
ी |
ô |
ौ |
ao | |
ं |
au |
Règle de la composition des différents sons, en ajoutant aux consonnes les voyelles modifiées comme ci-dessus.
Le tableau suivant est fait, d’après l’ordre de l’alphabet japonais, pour donner commodité et facilité aux Japonais qui étudient le sanscrit :
अ | इ | उ | ए | ओ |
a | i | u | ê | ô |
क | कि | कु | के | को |
ka | ki | ku | kê | kô |
च | चि | चु | चे | चो |
ç’a | ç’i | ç’u | ç’ê | ç’ô |
ट | टि | टु | टे | टो |
ṭa | ṭi | ṭu | ṭê | ṭô |
न | नि | नु | ने | नो |
na | ni | nu | nê | nô |
प | पि | पु | पे | पो |
pa | pi | pu | pê | pô |
प | पि | पु | पे | पो |
ma | mi | mu | mê | mô |
य | यि | यु | ये | यो |
ya | yi | yu | yê | yô |
र | रि | रु | रे | रो |
ra | ri | ru | rê | rô |
र | रि | रु | रे | रो |
va | vi | vu | vê | vô |
Ce signe se place au commencement des livres sacrés sanscrits ; c’est l’abréviation du caractère qui veut dire « origine, commencement, source »[5] (Voir page 321).
Ce signe se place à la fin de chaque membre de phrase. C’est l’abréviation du caractère qui veut dire « moi, partialité ». (Voir page 324.)
L’un de ces trois signes s’emploie, quand deux mêmes mots se trouvent placés successivement l’un à côté de l’autre, pour remplacer le dernier. Ces signes sont l’abréviation d’un caractère qui signifie « ombre ». (Voir page 323.)
Ce signe s’emploie pour effacer un caractère qui n’est pas écrit correctement ; on le met alors sur le caractère. Il est l’abréviation du signe qui veut dire « diminution, dommage, perte, déchet ». (Voir page 322.)
D’après un sanscritiste, ce signe n’est pas l’abréviation de ce caractère ; mais celle de celui qui signifie « dispute ». (Voir page 324.) Or, dans une dispute, on cherche à détruire ou effacer l’opinion de son adversaire ; de là résulte l’emploi de ce caractère comme signe de rature.
Je pense que ce signe de rature s’emploie particulièrement pour respecter un caractère à effacer, lorsque celui-ci a un sens mystique, car tous les caractères ayant un sens mystique ont été expliqués par le bouddhisme. Il ne s’emploie pas pour effacer les caractères ayant un sens commun.
On place un de ces signes à la fin d’un sujet de composition, parce qu’ils sont dérivés du caractère qui veut dire « Nirvâna » (sans passions), et que c’est là le dernier degré de la perfection de l’âme. (Voir page 322.)
Ce signe est l’abréviation du caractère qui signifie « donner l’aumône ». (Voir page 324.) Il se met à la fin du livre sacré pour indiquer que les enseignements écrits dans le livre sont donnés comme aumône à tous les êtres animés.
Explication des caractères mystiques, pris comme symboles.
Ces quatre caractères sont les symboles respectifs des quatre Bouddhas.
Ce caractère est le symbole de Daï-Niti-Niouraï. Ce symbole n’est autre chose que le caractère portant simultanément les trois signes de prononciations différentes, et par conséquent il ne peut être prononcé. Ce n’est pas d’après la grammaire sanscrite, mais d’après la règle symbolique de la secte sïn-gon que l’on ajoute ainsi à la fois trois signes différents à un caractère ; Daï-Niti-Niouraï est représenté par l’ensemble des quatre symboles précédents ; car en lui seul il possède les vertus des quatre Bouddhas.
Comme ce symbole ne peut pas être prononcé, on l’appelle (a) de la contraction de quatre caractères.
C’est le symbole d’un Amida autre que celui qui se trouve dans le Mandara[6].
Le symbole d’Amida est composé des trois caractères suivants, auxquels on ajoute ce signe :
signifie : avidité, convoitise. | |
signifie : colère. | |
signifie : égarement du cœur. |
Le caractère, symbole d’Amida, veut dire écarter ou éloigner les défauts exprimés par les trois caractères ci-dessus, parce que ce symbole est composé de ces trois caractères et qu’il porte à sa droite ce signe, qui signifie « éloignement, écartement ». Si l’on avait foi en Amida, on pourrait écarter ces défauts et égaler le Bouddha ; voilà pourquoi le caractère est pris comme symbole d’Amida.
- ↑ Le monde des Dragons (dans l’Inde, monde des Nagas), créatures fabuleuses ayant la forme et la nature des serpents, qui étaient de fermes soutiens de la foi bouddhique. Le Bouddha Shakamouni lui-même leur aurait enseigné une doctrine plus élevée et plus philosophique que celle qu’il prêchait aux hommes trop peu éclairés alors pour en comprendre la profondeur.
- ↑ Riou-Miô-Bosatsou est la traduction chinoise du nom d’un saint qui s’appelait en sanscrit Nâgârjuna-Bôdisatva.
- ↑ Il y a deux sortes de caractères sanscrits : les caractères qui se trouvent dans la première colonne sont ceux qui ont été introduits au Japon ; les autres, dans la seconde colonne, sont ceux qui ont été introduits en Europe.
- ↑ Ces sons liquides sont considérés comme voyelles dans le sanscrit, le pali et encore aujourd’hui dans le singalais moderne.
- ↑ Un grand nombre de sanscritistes n’ont pas admis les définitions de tous ces signes données par cet auteur et les ont considérés simplement comme signes n’ayant aucun sens.
- ↑ Mandara est le nom de l’ensemble complet des Bouddhas, classés par ordre. Il y a deux Mandaras, Taïzo-Mandara et Kongo-Mandara.