Revue des Romans/Antony Thouret

Revue des Romans.
Recueil d’analyses raisonnées des productions remarquables des plus célèbres romanciers français et étrangers.
Contenant 1100 analyses raisonnées, faisant connaître avec assez d’étendue pour en donner une idée exacte, le sujet, les personnages, l’intrigue et le dénoûment de chaque roman.
1839
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THOURET (Antony), né à Tarragone, de parents français, en 1807.


TOUSSAINT LE MULÂTRE, 2 vol. in-8, 1834. — Toussaint le Mulâtre est un livre écrit sous les verroux, et qui a traversé les guichets sombres et les grilles épaisses pour venir jusqu’à nous ; c’est l’œuvre d’Antony Thouret qui, détenu pour plus de trois ans et condamné à plus de 50 000 fr. d’amende, loin d’être abattu par la rigueur de ces peines, nous a donné en deux volumes le fruit de ses veilles et de ses insomnies. — Entre Argenteuil et l’île Saint-Louis, une petite maison mire dans l’onde sa blanche façade et ses volets verts : un philosophe, un alchimiste, nommé Spielberg, occupe cette riante habitation. Spielberg, venu d’Allemagne en France vers la fin du siècle dernier, jeune, riche et rempli d’illusions, épousa une noble demoiselle : il avait pour domestique à cette époque un nègre nommé Toussaint, et il croyait encore à l’amour et à la vertu de sa femme lorsqu’elle lui donna un fils mulâtre. D’une seconde union, que ni la loi civile, ni la sanction religieuse ne cimentèrent, Speilberg eut un autre fils nommé Alvar, blanc et beau jeune homme, qui, lorsque le livre commence, se trouve âgé de vingt-cinq ans, et président d’une section des droits de l’homme. En sa qualité de patriote exalté et de chef de club, Alvar est traqué par la police, et une prime de 1000 fr. est promise à qui trouvera le moyen de se défaire de lui. Pour gagner cette rétribution, un agent de la police secrète, nommé Silvio, provoque Alvar dans un café, le duel a lieu le même soir ; Alvar est légèrement blessé, et Silvio tué d’une balle dans la tête. Le témoin de Silvio, voyant son camarade mort, jure de se venger. Le jour des noces d’Alvar, un avis pressant l’appelle à Paris ; il y court, on l’arrête, et là commence à se dérouler le tableau d’une de ces persécutions dont l’histoire politique de nos jours est tissue. Dans cette partie de son livre l’auteur a mis ce qu’il a vu, enduré, senti, souffert. Le roman, il est vrai, est quelque peu oublié dans ces peintures ; mais on le retrouve après la condamnation d’Alvar. Il arrive entre Toussaint le Mulâtre et la femme de son frère Alvar, ce qui était arrivé entre le nègre Toussaint et la femme de son maître Spielberg : la catastrophe qui termine le roman est amenée par ce crime héréditaire.

On a encore de cet auteur : Blanche de Saint-Simon, in-8, 1835. — L’Enfant de Dieu, 2 vol. in-8, 1836.