Recherches sur les végétaux nourrissans/Treizième Objection



Treizième Objection.


Après toutes les opérations d’amidon & de pulpe, plus ou moins longues & diſpendieuſes, on n’aura point encore de pain de pommes de terre ; il faut en outre avoir recours aux détails de la Boulangerie, qui ne peuvent qu’ajouter au prix de l’aliment & à l’embarras de ſa fabrication.


Réponse.


Sans parler ici des circonſtances qui obligent quelquefois de laver & de ſécher les grains avant de les porter au moulin, ne faut-il pas en tout temps, par le moyen des différens cribles, les purger des ſemences étrangères qui ont crû dans le champ avec eux & de la poussière qui en recouvre la ſurface ; ce n’eſt pas tout, ils ne peuvent ainſi ſervir d’aliment, & entrer dans le pétrin du Boulanger ; il eſt néceſſaire de les tranſporter au moulin, d’où ſouvent l’on eſt fort éloigné, y attendre ſon tour, ſoigner ſon grain, le rapporter moulu à la maiſon pour le bluter : de plus, il faut ſe précautionner contre les intempéries des ſaiſons qui ſuſpendent les moutures, garder de la farine un certain temps afin de l’employer avec quelque profit ; tout cela a lieu naturellement ſans ſonger aux embarras multipliés, à la perte du temps, aux riſques que l’on court, livré à la diſcrétion d’un Meunier infidèle & mal-adroit, & tant d’autres inconvéniens qu’entraînent néceſſairement dans les campagnes, le travail de la converſion des grains en farine, & auxquels on ne fait nulle attention, parce qu’on en aura contracté l’habitude. L’action variée des Élémens ne ſauroit ſuſpendre l’extraction de l’amidon, tout fera ſous la main de celui qui en préparera du pain ; le Cultivateur peut déterrer la pomme de terre le matin, & avoir du pain à midi : la manipulation en deviendra par la ſuite plus facile, à la faveur des machines qui ont vaincu de plus grandes difficultés, en rendant tout poſſible.


Quatorzième Objection.


Comme la pomme de terre n’a guère que le goût que lui donne la cuiſſon, le ſel qu’on eſt obligé d’ajouter au pain qu’on en