Recherches statistiques sur l’aliénation mentale faites à l’hospice de Bicêtre/II/E

E.Épileptiques.
180.
État civil.
Célibataires, 146
Mariés, 25
Veufs, 9
Total. 180

Âge.
Avant 20 ans, 21
De 21 à 30, 45
De 31 à 40, 51
De 41 à 50, 34
De 51 à 60, 18
De 61 à 70, 9
De 71 à 80, 2
Total. 180
Durée de séjour.
Depuis 50 ans.
1
Depuis 13 ans.
2
Depuis 45 ans.
1
Depuis 12 ans.
2
Depuis 32 ans.
2
Depuis 10 ans.
6
Depuis 31 ans.
1
Depuis 18 ans.
11
Depuis 28 ans.
2
Depuis 17 ans.
7
Depuis 27 ans.
1
Depuis 16 ans.
7
Depuis 24 ans.
1
Depuis 15 ans.
13
Depuis 20 ans.
2
Depuis 14 ans.
16
Depuis 19 ans.
1
Depuis 13 ans.
10
Depuis 18 ans.
3
Depuis 12 ans.
25
Depuis 17 ans.
1
Depuis 11 an.
19
Depuis 16 ans.
2
De l’année.
37
Depuis 15 ans.
2
Depuis 14 ans.
5
Total.
180
Causes.
Frayeur.
10
Vue d’une épileptique.
1
Abus des plaisirs vénériens.
2
Coup sur la tête.
1
Masturbation.
2
Affection vermineuse.
1
Chagrins.
2
Hérédité.
1
Total.
20

Dans ce tableau, comme dans les précédents, nous trouvons le nombre des célibataires extrêmement élevé ; nous avons seulement 25 individus mariés sur 180, c’est le septième environ, tandis que les célibataires y sont pour plus des deux tiers. De ce résultat nous aurions tort de conclure que le célibat prédispose à l’épilepsie ; nous dirons, au contraire, que l’épilepsie est une cause directe de célibat.

Pour l’âge, nous en trouvons un assez grand nombre au-dessous de 20 ans ; c’est dans la première enfance, en effet, que débute ordinairement l’épilepsie ; et si les admissions annuelles ne donnent pas un chiffre plus considérable à cette époque de la vie, c’est que chez la plupart d’entre eux les accès sont rares et peu intenses dans les premières années, et que ce n’est qu’à mesure qu’ils se multiplient qu’on voit ces malheureux venir réclamer les secours de la médecine et l’asile qui leur est destiné. Le maximum se trouve dans la période de 30 à 40 ans, et cela probablement par la raison que nous venons de donner, ensuite, à cause de la mortalité, qui est en général assez précoce chez eux. Le chiffre tombe graduellement, en remontant vers la vieillesse : deux épileptiques seulement se trouvent dans la période de 70 à 80 ans. La mortalité explique aussi pourquoi, en général, leur durée de séjour ne va pas au delà d’un certain nombre d’années. 29 à peine, sur 180, sont à Bicêtre depuis plus de dix ans. Ceux qui sont entrés cette année sont les plus nombreux ; le chiffre diminue presque régulièrement à mesure que l’on remonte à un terme de séjour plus éloigné. Il ne faudrait pas attribuer ces résultats entièrement à la mortalité, car il est juste de tenir compte de quelques malades qui sortent après guérison, et de ceux plus nombreux encore qui quittent l’hôpital parce que leur maladie s’est améliorée, ou parce qu’aucun changement n’étant survenu dans leur état, ils renoncent à l’espoir de la guérison. La mortalité, avons-nous dit, est très précoce chez les épileptiques ; cette proposition, vraie d’une manière générale, deviendrait fausse dans l’application, si l’on n’avait pas le soin de distinguer les cas auxquels s’appliquent les exceptions que l’on rencontre. En effet, nous en avons quelques-uns qui sont très vieux, et ont de 20 à 50 ans de séjour, mais chez ceux-là les accès sont simples, éloignés et peu intenses ; leur maladie, en un mot, n’a pas cette gravité que l’on retrouve dans une foule d’autres cas. Ceci nous conduit à nous arrêter un instant sur la liaison de l’épilepsie avec l’aliénation mentale, question qui a été traitée longuement par MM. Bouchet et Cazauvieilh.

Voici ce que nous avons trouvé sur nos 180 épileptiques :

Maniaques, 32
Imbéciles et idiots 30
Déments, 17
Dont 4 avec paralysie.

Ce qui nous donne 79 épileptiques aliénés sur 180. MM. Bouchet et Cazauvieilh ont avancé que l’aliénation mentale est d’autant plus à craindre que l’épilepsie est développée chez un individu plus jeune ; nous avons plusieurs aliénés parmi nos jeunes épileptiques, mais nous comptons surtout à cet âge des imbéciles et des idiots : nul doute que l’épilepsie ne puisse arrêter le développement des facultés par les perturbations qu’elle amène dans le cerveau, c’est ce qui fait qu’elle est souvent liée à l’idiotie dans le jeune âge. Peut-être ce qu’en ont dit les auteurs que nous venons de nommer est surtout applicable à ce genre de complication. Quoi qu’il en soit, le chiffre que nous avons donné exprime pour les idiots un rapport très élevé ; il est d’un sixième, comme pour les maniaques, tandis que les déments n’y entrent que pour un dixième à peu près. Ces derniers, dont quatre sont paralysés, sont certainement tombés dans cette dégradation sous l’influence de leurs accès. Les trente maniaques que nous avons notés ne présentent pas tous un délire continu ; quelques-uns seulement sont dans ce cas, mais la plupart ne délirent qu’à la suite de leurs attaques ou par intervalles éloignés, après une période d’accès plus intenses. Le délire dure quelques heures chez les uns, un ou plusieurs jours chez d’autres. Les auteurs ont signalé le degré de violence de leurs accès de délire, nous avons été à même de faire cette remarque chez 7 à 8 de nos malades ; et enfin, cette expression de fous furieux, qui était si générale autrefois, n’est plus guère applicable qu’à cette classe d’aliénés. Parmi les causes notées, la frayeur occupe le premier rang ; c’est l’influence, en effet, la plus certaine et la mieux constatée dans le développement de l’épilepsie ; puis viennent deux causes d’épuisement, la masturbation et l’excès du coït. L’hérédité n’a été observée qu’une seule fois.


FIN.