Quelques poëtes français des XVIe et XVIIe siècles à Fontainebleau/Philippe Desportes


PHILIPPE DESPORTES

1546-1606


Desportes



Desportes et Bertaut !


De ces deux noms unis à jamais par un trait de satire qui s’est transformé, pour eux, en un rais de gloire, émettre l’un, omettre l’autre, ce n’est guère possible.


D’autant que Desportes, lui qui fut l’âme damnée — et c’est bien le mot ! — du duc d’Anjou, du duc d’Orléans, du roi de Pologne, du roi de France Henri III (c’est le même, sous ses titres successifs), passa certainement des jours et des journées à Fontainebleau.

La vie de Philippe Des Portes est curieuse. Il fut d’abord clerc, à Paris, chez un procureur. Mais il plut trop à la procureuse, qui était jolie. Et un jour qu’il rentrait d’une course en ville, il trouva, pendu au maillet de la porte de l’allée, un paquet « avec cet escriteau : Quand Philippe reviendra, il n’aura qu’à prendre ses hardes et s’en aller. » Philippe s’en alla, jusqu’en Avignon. Et là, comme il était posté « sur le pont où les valets à louer se tiennent », attendant qu’un majordome vint l’engager pour n’importe quelle basse besogne, « il entendit quelques jeunes garçons qui disoient : M. l’evesque du Puy a besoin d’un secrétaire. » Il se présenta, fut agréé, et, à peine en charge, ne put faire mieux que de se rendre amoureux de la nièce du prélat, une demoiselle de Senneterre. Mais il dut bientôt suivre l’évêque par delà les monts ; c’est là qu’il se familiarisa avec les œuvres du Pétrarque, du Bembe et de l’Arioste ; c’est alors qu’il s’imprégna de la douceur italienne, et commença de remplacer par elle, en son œuvre, les sévérités grecque et latine qui avaient primé parmi les poètes de la Pléiade. En ce changement de ligne consiste surtout l’évolution littéraire qu’il lui fut donné d’accomplir, ou dont il fut, tout au moins, le principal fauteur. Il n’est besoin, pour constater la chose, de s’arrêter aux traductions ou imitations directes : Roland furieux, La Mort de Rodomont, Les Complaintes de Bradamant, Angélique. On ne rencontre pas, dans sa Diane, dans ses Amours d’Hippolyte, dans sa Cleonice, dans ses Diverses Amours, un sonnet sur dix qui ne contienne quelque réminiscence florentine. Cela lui fut reproché, mais il s’en fit bravement un mérite et déclara « qu’il avoit pris aux Italiens plus qu’on ne disoit. » Et il avait raison de s’en vanter, car il introduisait ainsi un rajeunissement dans l’idée, et, dans la langue, une politesse et une fluidité nouvelles ; et ce manque, inapparent, d’originalité ne l’empêche pas d’être l’un des six ou sept meilleurs poètes de la Renaissance, mêlant des grâces antiques à des élégances modernes.


Peu d’années après le Pont d’Avignon — il eut, entre temps, des passes de bonne ou de mauvaise fortune sur lesquelles nous n’avons guère que des données confuses, — Desportes est à la cour, secrétaire particulier du marquis de Villeroy qui était le premier ministre de Charles IX, et il vit déjà dans l’intimité du futur Henri III. Ce qu’était cette sorte de camaraderie, établie sur un pied d’étrange intimité et fondée sur des complicités galantes, — où la distance du rang ne disparaît que trop, — une seule anecdote va le montrer plus amplement qu’il n’est besoin. Et j’aurais scrupule à mettre en bonne lumière une peinture de mœurs assez scabreuse, si cela ne nous ramenait chez nous, si ce n’était peut-être bien à Fontainebleau que s’est déroulée l’Advanture Première, mise à la fin du Livre II des Elégies de Desportes.


Cette histoire, la voici, voilée de noms et d’appareil mythologiques.


Olympe n’aime pas. Fleurdelys, plus sçavante aux effets de l’amoureuse flamme, l’en gourmande en tendre amie. Mais ses discours y font moins que la venue et la vue du vaillant Eurylas, et tout de suite leurs deux cœurs sont navrez par un traict seulement. Olympe se désole, devant les difficultés qu’introduit un mary jaloux et défiant. Une nuit, la fatigue d’une longue insomnie l’endort enfin, au moment même où l’aube, d’un beau jour, va poindre, et Vénus lui apparaît pour lui enseigner, d’un doux langage, le sûr et le seul moyen de guérir son mal.


Au fond du vieux palais, autresfois le séjour
Des demi-dieux de France, est un temple d’Amour :
A nuaux argentez la voûte est toute painte ;
Là se voit, à main droite, une figure sainte
Du paradis heureux des amans fortunez.
De leurs longues douleurs à la fin guerdonnez.
Sitost que le Soleil, commençant sa carrière
Pour porter aux humains la nouvelle lumière
Sera sur le midy, lorsqu’on n’y pense pas
Et que chacun s’attend à prendre son repas,
Ayant avecques vous pour compagne fidelle
Camille, attainte au vif de l’ardante estincelle
Des yeux de Floridant, qui meurt pour ses beautez.
Choisissez sagement les lieux plus escartez
Et vous rendez sans crainte en cette heureuse place.
C’est là que vous sçaurez l’heur que je vous pourchasse,
Mes délices, mes jeux, mes gracieux tourmans,
Et de quelles douceurs j’enyvre les amans.


Puis la Déesse s’envole, et, comme elle partoit,


Le ciel tout rejouy ses louanges chantoit,
Les vents à son regard tenoient leurs bouches closes,
Et les petits Amours faisoient pleuvoir des roses.


Olympe aussitôt va trouver Camille, et celle-ci (Amour luy donnoit cœur) se charge d’arranger cela. Mais ce ne fut pas tout : les deux bonnes pièces pensent sans doute que plus on est d’amants plus on aime ;


Mais ce ne fut pas tout : Olympe qui sçavoit
Qu’au sang de Fleurdelys Amour ses traicts lavoit
Ayant en mille endroits sa poitrine enserrée
Par les divins attraits du gracieux Nirée,
Compagnon d’Eurylas, veut que pareillement
Elle soit leur compagne en ce contentement.


Olympe croit, non sans raison, qu’elle doit bien quelque chose à Fleurdelys en reconnaissance des bons conseils que celle-ci lui prodiguait naguère. Mais le narrateur n’est point de cet avis ; il réprouve :


Olympe, que fais tu ? les amoureux mysteres
Sont tousjours plus sacrez, plus ils sont solitaires.
Ne t’avises tu point que c’est trop entrepris ?
Tu passes le conseil de la belle Cypris,
D’accroistre ainsi le nombre et mettre en la partie
La jeune Fleurdelys, sans l’avoir advertie.


Olympe ni Camille ne se sont fait ces réflexions. Elles vont prendre Fleurdelys, sous un prétexte de passer la journée à se promener. Mais, dès que Fleurdelys voit à qui l’on veut la conduire, elle s’enflamme de colère, parle haut, crie, tempête. Les amants sont consternés. Nirée


                d’un parler triste et passionné
S’efforce d’amollir ce courage obstiné.
La pauvre Olympe mesme à mains jointes la prie,
L’appelle son désir, sa lumière et sa vie,
La serre estroitement, embrasse ses genoux,
Puis quelquefois se fasche et lui parle en courroux.

Et elle lui parle même avec quelque éloquence imagée et une logique spéciale assez forte :


Hé quoy ! lui disoit elle, où est vostre asseurance !
Où sont tous ces propos si pleins de véhémence
Que vous me soûliez dire afin de m’enflammer,
Avant que deux beaux yeux m’eussent forcé d’aimer ?…
Comme un soldat craintif, qui bien loin du danger
Ne bruit que de combats, de forcer, d’assiéger,
Par le haut des coüards, leur lascheté reproche,
Puis fuit honteusement quand l’ennemy s’approche,
Vous fuyez tout ainsi d’un cœur lasche et peureux,
Bien que vostre ennemy ne soit pas rigoureux.


Rien n’y fait, et, de guerre lasse, laissant Nirée et Fleurdelys s’arranger, tout seuls, s’ils le peuvent,


Les amans désireux et les deux jeunes dames
Entrent au paradis tant de fois souhaité,
Agréable séjour de leur félicité.


Il serait peut-être imprudent de chercher à savoir si ce Temple d’Amour avait plusieurs chapelles. Sainte-Beuve pense que le lieu ne saurait être différent de Fontainebleau, et je ne sais s’il faut d’une manière absolue incliner à son sentiment. Nulle autre des résidences ne pourrait selon lui prétendre à ce titre de vieux palais des rois de France. Et, qui plus est, le détail de la promenade simulée de trois femmes seules semble indiquer que la scène ne peut se passer à Paris, parmi les rues à traverser pour aller soit dans l’ile de la Cité, soit du côté de quelque Tour de Nesles, de licencieuse mémoire. Mais l’expression : autresfois le séjour… a bien de la force, et il serait peut-être malaisé de trouver ici un vestige de la salle aux nuées d’argent.


Mettons les noms, maintenant. Olympe serait Marie de Clèves, princesse de Condé, Eurylas, le futur Henri III, Fleurdelys, sa sœur et l’épouse du Béarnais, Marguerite de Valois, Nirée, le duc de Guise. De la suivante Camille, on ne dit rien, ni du gentilhomme, à moins que Floridant ne soit Desportes lui-même, qui parait bien avoir pris part à cette Advanture. Il est une autre tradition qui veut que Nirée soit, non pas le duc de Guise, mais Desportes. En effet Marguerite a là un accès de vertu presque invraisemblable et, chez elle, insolite ; et Sainte-Beuve se demande si le discret poète ne fait pas le modeste et ne se refuse pas à compromettre sa dame. Le libre compagnon Brantôme fait de la chose un récit fort analogue, avec quelques nuances, et notamment celle-ci qu’aucun des six personnages ne bouda. On sait en outre que Desportes eut la réputation d’être au mieux avec Marguerite de Valois ; et Henri IV ne l’ignora pas. « Un jour, dit Tallemant des Réaux dont on a déjà, plus haut, reconnu la patte, un jour le Roy luy dit en riant, en présence de madame la princesse de Conty : Monsieur de Tiron (c’esloit sa principale abbaye) il faut que vous aimiez ma niepce : cela vous reschauffera et vous fera faire encore de belles choses, quoyque vous ne soyez plus jeune. La princesse luy respondit assez hardiment : Je n’en serois point faschée ; il en a aimé de meilleure maison que moy. Elle entendoil la Reyne Marguerite que des Portes avoit aimée lors qu’elle n’estoit encore que reyne de Navarre. » Henri IV n’avait peut-être pas absolument volé cette verte réplique.


On vient de voir que Desportes était abbé : en ce temps, tous les poètes étaient abbés, — comme ils sont aujourd’hui tous attachés à un ministère, et c’est, la plupart, avec une semblable conviction. Mais vraiment Desportes cumula. Il fut abbé de Tiron, abbé d’Aurillac, abbé des Vaux de Cernay, abbé de Josaphat, abbé de Bonport, près Rouen, et de plus chanoine de Chartres et chanoine de la Sainte-Chapelle. 11 refusa d’être archevêque de Bordeaux, alléguant qu’il ne voulait pas avoir charge d’âmes (ses moines, disait-il, n’en avaient pas). Il ne fut cependant pas prêtre et ne reçut point les ordres, à ce qu’il semble. Le tout se bornait à prélever la meilleure part des revenus de ces diverses abbayes et à s’en faire un nombre respectable de mille livres de rente.


C’était en outre l’un des personnages les plus importants et tes plus influents de la Cour. Il était monté à cette haute fortune grâce aux ressources inépuisables de son esprit, d’une tournure, pour tout dire en un mot, infiniment diplomatique, — ayant l’air de ne pas voir, ou ne voyant pas en réalité, ce qu’il eût été trop gênant de voir, — et grâce à la faveur de Henri. Il donna à ce prince une grande marque d’amitié lorsqu’il consentit à l’accompagner en Pologne, l’an 1573. Ni le roi ni le poëte ne pouvaient se plaire parmi ce peuple barbare, arrogant et volage. Desportes demanda son congé au bout de neuf mois, et partit en mai 1574, laissant un Adieu à la Pologne en quelques strophes vindicatives et méprisantes ; et son maître ne s’y attarda guère non plus, puisque, abandonnant son sauvage royaume pour un autre, incomparablement plus beau, que lui donnait la mort de Charles IX, il reparaissait en France dès septembre de la même année. Depuis, jusqu’en 1589, Desportes connut tous les fastes du règne de Henri III.


Il fut plus d’une fois sans doute le pourvoyeur des plaisirs du monarque. Ne nous préoccupons que de ceux qui sont d’ordre littéraire. Il fit, comme tous ses confrères, pas mal de vers de ballet :

Pour les Chevaliers du Phénix. Aux Dames.

Pour une masquarade de Faunes.

Vers recitez en une masquarade.

Stances a la Royne pour un ballet de douze de ses filles.

Cartel pour monsieur le duc du Maine et sa troupe. Sur la mort d’Amour.

Pour la masquarade des Chevaliers fidelles.

Pour la masquarade des Visions.

Pour des Chevaliers portant des testes d’hydre.

Pour la masquarade des Chasseurs.

Pour la masquarade des Chevaliers agitez.


Lesquels de ces Ballets ou de ces Mascarades eurent Fontainebleau pour théâtre, ce serait à rechercher.


Et de ce règne Desportes connut aussi les mélancolies finales.


À quelle date exacte faut-il rapporter cette Complainte pour le roy Henri III estant A Fontainebleau, lieu de sa naissance, qui se trouve à la suite d’une série d’Epitaphes et de Regrets funèbres ?


Lieux de moy tant aimez, si doux à ma naissance,
Rochers, qui des saisons dédaignez l’inconstance,
          Francs de tout changement ;
Effroyables déserts, et vous, bois solitaires,
Pour la dernière fois soyez les secrétaires
          De mon deuil véhément.


Il y a là vraiment une note d’élégie toute moderne et comme Lamartinienne. Le temps des fêtes est passé. L’heure n’est plus de chanter et d’aimer et de rire, ainsi qu’aux années qui se sont envolées si vite. Le roi a vieilli, s’est assombri, et il lui semble que tout se soit assombri étrangement autour de lui, avec lui, en même temps que lui.


Je ne suis plus celuy dont la grâce et la veuë
Rendoit ceste contrée en tout tans si pourveuë
          D’amours et de plaisirs.
Qui donnoit à ces eaux un si plaisant murmure.
Tant d’email à ces prez, aux bois tant de verdure.
          Aux cœurs tant de désirs.


Cette marche parallèle du deuil de la nature avec le deuil humain a été dite bien des fois ; mais le roi, par la bouche du poëte, va plus loin, et jusqu’à penser que si les fleurs sont mortes et si les sources ne chantent plus, c’est à cause de lui, c’est par son influence, c’est (il a peut-être raison !) par horreur de lui.


Quand j’approche de vous, belles fleurs printanieres,
Vostre teint se flestrit ; les prochaines rivières
          Cherchent d’autres destours :
Je fay tarir l’humeur de ces fontaines claires
Qui craint que de mes yeux les sources mortuaires
          Ne profanent son cours.

J’ay le cœur si comblé d’amertume et d’oppressé !…


Il sied de noter en passant un détail pittoresque, bien exact et local, où l’on voit soudain se dresser les silhouettes arides de quelques-uns des monts de la Forêt, visibles des fenêtres du Château.


Pleust au ciel, dont les loix me sont si rigoureuses.
Que je fusse entre vous, ô grandes masses pierreuses !
                    Un rocher endurcy…


Ces grandes masses pierreuses, nous les connaissons, et elles sont bien spéciales, caractéristiques ! Desportes devait les avoir longtemps contemplées pour les évoquer si sûrement ; elles devaient être sous ses yeux quand il écrivait cela. Il entend aussi des clameurs d’oiseaux dont Novembre nous assourdit :


Ce sont cris de hibous, d’importunes corneilles
          Et d’oiseaux de la mort.


L’ode se clôt sur une assez belle strophe :


Nimphes de ces forests, mes fidelles nourrices,
Tout ainsi qu’en naissant vous me fustes propices,
          Ne m’abandonnez pas,
Quand j’achève le cours de ma triste advanture :
Vous fistes mon berceau, faites ma sépulture,
          Et pleurez mon trespas.


Ce n’est plus le ton alerte et joyeux de l’Advanture Première ! Maintenant, c’est la dernière, — las ! la triste. J’ay le cœur si comblé d’amertume et d’oppressé !… Oui, cette fin de règne est sinistre. Joyeuse est mort, Saint-Mégrin, Quéius et Maugiron sont morts ; toutes les créatures des Valois ont disparu ; le pouvoir est tiraillé entre les ligueurs et les huguenots ; un prince jeune et vivace, que tout désigne, prépare déjà l’ère nouvelle près de s’ouvrir, et ce qui fut debout va s’effondrer lamentablement. Henri III succombe sous les coups d’un assassin, et les Nymphes de Fontainebleau ne dresseront pas son tombeau.


Mais Desportes a plus de ressort que cela. Il survivra à son maître et à tous ses amis, et, la poussière de ce grand écroulement une fois tombée, il reparaîtra plus fort qu’avant.


À cette époque de troubles où le nouveau roi de France était obligé de conquérir son héritage cité par cité et province par province, il était aisé de se tailler de petits royaumes dans le grand. Au mois de juillet 1591 l’amiral de Villars a mis la main sur Rouen. Il s’y déclare seul maître, s’y fortifie, y cantonne ses troupes, et soutient un siège, et repousse plusieurs assauts tentés par le vainqueur d’Ivry en personne. Il a auprès de lui un conseiller, âme de l’entreprise et de la résistance, et qui est l’esprit quand il n’est que le bras : et ce lieutenant, c’est Desportes.


Il y a même là une tierce personne, et l’on pourrait dire que c’est un triumvirat, s’il ne s’agissait d’une femme, madame de Simiers. C’était une ancienne fille d’honneur de Catherine de Médicis qui avait été, alors, la maîtresse de Desportes, et qui fut celle de l’Amiral, et contribua sans doute à adoucir pour l’un comme pour l’autre les ennuis du siège. C’était une très belle personne et c’était, de plus, une politique. À eux trois, Villars, Desportes et madame de Simiers formaient un gouvernement des plus singuliers, à coup sûr ; mais la force n’en eut pas raison. Il fallut traiter, et Sully s’applaudit maintes fois de rencontrer en contrepoids à la fougue de l’Amiral, la prudence d’esprit de ses deux associés. L’accord ne se fit pas sans de nombreux avantages concédés aux possesseurs de Rouen, et, comme on le peut penser, la part de Desportes ne fut pas la moindre, ou la moins réelle, la moins solide.

Après cela Desportes se fit hermite en son abbaye de Bonport. Il y traduisit les Psaumes, — les Psaumes comme le Roland, David succédant à l’Arioste, — entre deux jeunes femmes, (on pourrait penser que le diable ne perd jamais complètement ses droits), entre madame Patu et madame d’Aigrontin, qui l’aidaient dans ce travail, revoyant, annotant et commentant le texte et la version. Il y avait rassemblé une riche bibliothèque, et il y mourut, au milieu de ses livres, en 1606, âgé de 60 ans, riche et illustre, désintéressé des choses, et se reposant — en homme qui, pour un poète, avait fait beaucoup de chemin, de Paris à Avignon, et d’Avignon à Rouen, en passant par Fontainebleau.