Psyché/Troisième Partie/Chapitre I.

Slatkine reprints (p. 169-172).

TROISIÈME PARTIE


I


Une heure plus tard, Aimery la retrouva dans sa chambre pleine de nuit.

Elle était debout à la fenêtre, le coude sur le mur et le front dans la main. Elle regardait au hasard, par delà les prés obscurs et la pièce d’eau étoilée.

Pourquoi restait-elle sans lumière ? Aimery lui demanda : elle secoua la tête et, avant même qu’il lui eût baisé la joue, il sentit qu’elle avait pleuré.

« Encore des larmes, Psyché ! des larmes le soir d’un tel jour ! »

Épuisée, elle ne sut répondre ni qu’elle pleurait d’angoisse, comme il était vrai, ni qu’elle pleurait de joie comme elle voulut le dire. Elle murmura : « Ce n’est rien. Je t’aime », mais d’une voix qui s’altérait. Elle toussa pour changer de ton.

« Ce n’est rien, reprit-elle. Je t’aime et je pleure. J’ai toujours pleuré, tu le sais bien. Mon bonheur et ma peine finissent par les mêmes larmes, et celles de ce soir coulent je ne sais pourquoi. »

Il ne lui parla plus, mais fixa sur elle ses yeux inquiets et très tendres. Les deux regards mêlèrent leurs ondes silencieuses. Celui d’Aimery était si clair, si franc, si animé de lumière aimante, qu’un instant elle douta de son propre doute.


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(Ici s’arrête le manuscrit de Pierre Louÿs.)