Sébastien-Charles Leconte, Les Ténèbres suprêmes

ses nombreuses années en Nouvelle-Calédonie et ses voyages en Inde et en Polynésie nourrirent les poésies qu’il publia ensuite d’impressions mystiques et visionnaires, à l’image de son homonyme Leconte de Lisle dont il fut, avec José-Maria de Heredia, considéré comme un des successeurs.

« Sur quelles mers, sous quels caps de l’infini sombre,
La flotte des soleils, aux pavois bardés d’or,
Eteindra-t-elle enfin ses feux, sanglants encor
Des suprêmes combats livrés aux Dieux de l’ombre ?

Combien d’humanités, nombrant par millions
Leurs âmes, lasses et lourdes de combien d’âges,
Auront donc fourmillé sur les puissants bordages
Des planètes tanguant au creux de leurs sillons ?

Que de fois aurez-vous, ô vivaces fournaises !
À l’étrave de feu des mondes, arboré,
Comme une enseigne aux crins chevelus, la forêt
Renaissante toujours des mortelles genèses,

Avant que le froid noir de l’abîme glacé,
Sur vos mâtures de flamme, n’appesantisse
L’étreinte du linceul implacable, que tisse
Chaque heure descendue aux limbes du passé ?
 »