Poésies de Benserade/À Madame des Houillières

Poésies de Benserade, Texte établi par Octave UzanneLibrairie des bibliophiles (p. 122-124).



À Madame Des-Houillières.


Jeune et charmante Des-Houillières,
Naguère entre les écolières,
Et maintenant, depuis le prix,
Maîtresse entre les beaux esprits,
Quand je vous rends quelque visite,
Devant vous je crains, et j’hésite
À me plaindre de vos appas.
C’est bien pis, ne vous voyant pas.
Tant que je suis à la campagne,
Ma seule idée est ma compagne,
Et ma seule idée, entre nous,
Ne me représente que vous.
Toutes choses me sont contraires,
Et mes rivaux sont mes confrères.
Examinons-les donc un peu :
Pour vous, Boyer est tout en feu,

Boyer que vous menez en laisse,
Qu’il vous laisse là ; je luy laisse,
(Pourvu qu’il prenne un autre ton)
Jusques à mon dernier jetton.
Lavaux peut-être se dispense
De vous dire tout ce qu’il pense.
Quinaut, sera toûjours Quinaut,
C’est-à-dire, doux, tendre et chaud.
Dussay-je perdre mon escrime,
Je veux les perdre tous en rime,
Moy qui suis en rime fécond.
Du Perier sera mon second,
Sa maigreur est la seule chose
Dont je me sers, et que j’oppose
À l’embompoint de Charpentier,
À qui je ne fais point quartier,
Puis qu’il vous cajole et s’embrase
Dans tous vos fauteuils qu’il écrase.
Perraut, qui vous hante, et sur rien
N’affecte le goût ancien,
Voudroit faire avec vous des siennes,
Vous qui n’êtes pas des anciennes.
J’ay tout ce grand corps sur les bras,
Et Ménage qui n’en est pas.

Je n’en dis rien, mais j’en enrage ;
Et chez vous tout me fait ombrage.
Le Clerc n’est point là pour néant,
Tout rival me paroît géant.
Amour ne vit que de rapines :
L’on est toûjours sur les épines,
Et rien moins que sur le veloux,
Dès qu’on est absent et jaloux.



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