Poésie (Rilke, trad. Betz)/Dernières poésies/Chanson
CHANSON[1]
Toi, à qui je ne confie pas
mes longues nuits sans repos,
Toi qui me rends si tendrement las,
me berçant comme un berceau ;
Toi qui me caches tes insomnies,
dis, si nous supportions
cette soif qui nous magnifie,
sans abandon ?
Car rappelle-toi les amants,
comme le mensonge les surprend
à l’heure des confessions.
Toi seule, tu fais partie de ma solitude pure.
Tu te transformes en tout : tu es ce murmure
ou ce parfum aérien.
Entre mes bras : quel abîme qui s’abreuve de pertes.
Ils ne t’ont point retenue, et c’est grâce à cela, certes,
qu’à jamais je te tiens.
- ↑ La traduction de ce poème est de Rainer Maria Rilke.