Poèmes épars (Lenoir-Rolland)/La fête du peuple

Texte établi par Casimir HébertLe pays laurentien (p. 24-25).

1848
La fête du peuple

 Femmes de mon pays,
 Blondes et brunes filles,
 Aux flottantes mantilles,
 Hommes aux fronts amis
 Venez, la fête est belle,
 Splendide, solennelle,
C’est la fête du peuple et nous sommes ses fils
 Quand il veut d’une fête,
 Le peuple ceint sa tête,
 Ses épaules, ses reins ;
 L’érable est sa couronne ;
 L’écharpe qu’il se donne,
 Quoique noble, rayonne
Moins que sa gaîté franche et ses regards sereins,
C’est la fête du peuple ; accourez-y, nos maîtres,
Vous qui pour son suffrage avez tendu la main.
C’est la fête du peuple ; allez que vos fenêtres
De leurs riches pavois ombragent son chemin !
 Cette bannière qui déploie
 Nos couleurs sur l’or et la soie


 N’est-elle pas bien belle à voir ?
 Dirait-on pas que cette brise
 Qui fait ployer sa lance grise
 Anime son beau castor noir.
 Amis, j’ai vu de douces choses,
 Des filles, des perles, des roses,
 Mais pour se contenter, il faut
 Voir ce navire aux pleines voiles,
 Qui s’élance vers les étoiles,
Disant : « Je voguerai plus haut. »
Quand il a déroulé les plis de ses bannières,
Quand le parvis du temple a brui sous son pied,
Le peuple était sublime… Oh ! j’aime les prières
Et les chants de ce temple où tout homme s’assied.
C’est la fête du peuple et son mâle génie,
Après les durs labeurs demande les plaisirs ;
Il lui faut des festins, des bals, de l’harmonie :
Les parfums du banquet apaisent ses désirs.
 Blondes et brunes filles,
 Femmes de mon pays
 Aux flottantes mantilles,
 Hommes aux fronts amis,
 Venez la fête est belle,
 Splendide, solennelle,
C’est la fête du peuple et nous sommes ses fils.