Pertaub-Sing
Revue des Deux Mondes, période initialetome 13 (p. 1141-1152).

PERTAUB-SING.




Procès du Raja de Sattara en Angleterre

A plusieurs reprises il a été question, dans cette Revue, des lointaines et brillantes contrées où l’Angleterre a su fonder un prestigieux empire. On y a parlé de ces Mahrattes turbulens, toujours redoutables, qui, placés au cœur même de la presqu’île indienne, tiennent en éveil la vigilance des dominateurs ; c’est encore d’eux qu’il s’agit dans un procès important qui occupe depuis plusieurs années l’attention de l’Inde anglaise, et dont on suivra peut-être avec quelque intérêt le développement. Dans une si grave circonstance, je ne veux pas seulement étudier un fait historique, essayer la réhabilitation d’un individu obscur, poursuivi, opprimé durant de longues années, comme coupable d’un crime qui n’a jamais été prouvé ; mon but n’est pas non plus de flétrir stérilement, sans profit pour celui qui en a souffert, les intrigues d’une politique honteuse. La révision du procès dont je veux parler peut avoir des résultats plus efficaces : elle tend à amener la réintégration de l’accusé dans ses biens dont on l’a privé, dans l’exercice de ses droits dont on l’a dépouillé, enfin à le replacer sur le trône dont on l’a fait descendre, car ce prétendu criminel est un roi de l’Inde condamné pour haute trahison par la cour toute puissante qui décide du sort des peuples et des monarques d’une partie de l’Asie.

Au printemps de l’année 1817, Bajee-.Rao, qui régnait à Poonah, capitale des Mahrattes de l’ouest, conçut le projet de secouer le joug du gouvernement de la compagnie ; les hostilités éclatèrent dans l’automne de la même année. La guerre dura plus de six mois ; quatre fois vaincu, dépouillé successivement de toutes ses citadelles, qui n’étaient plus imprenables comme dans les temps anciens, Bajee-Rao se rendit à sir John Malcolm. Aux termes de la capitulation, on lui laissa la vie, on lui accorda une somme annuelle assez considérable, et il put se retirer à Benarès, y passer ses jours dans cette médiocrité dorée qui serait le comble du bonheur et de la fortune pour quiconque ne regretterait pas un trône. Cependant, comme la compagnie laissait aux Mahrattes vaincus une ombre d’indépendance, elle voulut leur donner un fantôme de roi. Bajee-Rao n’était, à vrai dire, qu’un usurpateur ; il succédait à cette série de pechwas ou maires du palais, de race brahmanique, qui, s’emparant de l’autorité héréditaire, avaient relégué les princes légitimes à Sattara. Un de ces derniers vivait encore dans cette espèce d’exil, un descendant du célèbre Sivajee, fondateur de l’empire mahratte au XVIIe siècle. Ce fut sur lui que tomba le choix de la compagnie ; seulement, au lieu de l’installer à Poonah, ville fatale, où les conspirations se renouaient sans cesse, on fixa sa résidence à Sattara même. Le territoire borné qui fut mis sous sa dépendance renfermait à peine un million et demi d’habitans ; à Poonah, c’était la compagnie qui régnait par ses casernes, par son parc d’artillerie, par l’ascendant d’une puissance victorieuse.

Le nouveau souverain de Sattara se nommait Pertaub-Sing ; il se trouva qu’au lieu d’avoir mis sur ce trône un fantôme de roi, la compagnie avait appelé au pouvoir un homme distingué, capable de gouverner de plus vastes états, intelligent et juste, ce qui est rare parmi les princes de l’Inde. Le général Briggs et le général Robertson, accrédités près de lui à titre de résidens, ont fait de vive voix et dans leur correspondance l’éloge de sa conduite ; ils déclarent « l’avoir toujours vu disposé à respecter les engagemens qu’il avait pris envers la compagnie, toujours reconnaissant de ce que ce gouvernement avait fait pour lui. » Son administration était citée par ces mêmes résidens « comme un modèle à proposer à tous les souverains hindous. » Il savait borner les dépenses de sa maison, surveiller toutes les affaires de ses états sans le secours d’aucun ministre ; par ses soins, un collége s’était élevé à Sattara, dans lequel on enseignait aux jeunes Mahrattes, outre l’idiome national, les langues persane et anglaise, l’art de lever des plans et l’arithmétique. Dans les documens recueillis à cette première époque de son règne, la cour des directeurs reconnaît qu’on doit au raja un témoignage de satisfaction « pour sa belle conduite et pour l’excellence de son administration. » Elle engage le gouvernement de Bombay à lui rendre cette éclatante justice, et remet au prince une épée d’honneur comme une marque de son estime et de sa haute considération, as a tolsen of their high esteem and regard. Voilà, certes, bien des certificats de bonne conduite gratuitement délivrés à Pertaub-Sing par la cour des directeurs, sur les notes favorables envoyées par le gouvernement de Bombay, qui lui-même recevait ses impressions des résidens, c’est-à-dire des personnes placées le plus près possible du raja pour surveiller ses actions.

Ces bonnes relations durèrent jusqu’en 1835 ; l’épée d’honneur fut annoncée au raja par une lettre datée du 29 décembre de cette même année. En 1836, ce raja, sur le compte de qui la cour des directeurs se formait un jugement si avantageux, est accusé, par deux officiers natifs du 23e régiment d’infanterie de Bombay, d’avoir essayé de les séduire en les détournant du service de la compagnie. Deux témoins, un brahmane et un serviteur du prince, affirment avoir assisté à l’entrevue. Une commission est nommée par le gouverneur de Bombay pour rechercher la vérité de ces accusations ; le raja, sommé de comparaître devant ses juges, entend lire les actes qui le condamnent sans les comprendre entièrement. Ces actes étaient écrits en hindoustani ; Pertaub-Sing demande qu’on les traduise en mahratte, dans sa langue natale ; on lui promet de faire droit à sa réclamation, et il se retire en attendant avec confiance qu’on lui remette ces pièces de conviction, qui tiennent la vengeance de la compagnie suspendue sur sa tête. Le temps se passe, les copies n’arrivent point, et le raja est déclaré « condamné par son silence ; » en d’autres termes, la commission annonce au gouvernement de Bombay que le raja « a été incapable de prouver la fausseté des accusations dirigées contre lui. » En 1837, Pertaub-Sing insiste près du lieutenant-colonel Ovans, nouveau résident à la cour de Sattara, et l’un des membres de la commission, afin que remise lui soit faite de ces copies ; pour toute réponse, le lieutenant-colonel Ovans répond que « l’enquête a été secrète, le résultat des témoignages tenu secret aussi, et que, par conséquent, les pièces ne peuvent être remises à l’accusé ! »

En 1838, deux nouvelles accusations monstrueuses et grotesques pèsent sur ce raja, qu’on avait naguère proposé pour modèle à tous les princes de l’Inde. 1° Il avait conspiré avec don Manoel de Castro, gouverneur de Goa, qui devait lui amener de Portugal trente mille hommes (et où les aurait-il pris ?), pour l’aider à chasser les Anglais de leurs possessions. 2° Il s’était entendu avec Moodhojee-Bhonsleh, souverain de Nagpore, royaume des Mahrattes du nord, pour engager la Turquie à laisser passer sur son territoire une armée russe qui eût envahi l’Inde. Il a même été dit quelque part que quinze mille soldats français et un nombre effrayant d’élèves de l’École Polytechnique devaient voler au secours de ce raja, dont on ne soupçonnait guère l’existence à Paris ! Les autorités britanniques accueillirent avec une incroyable niaiserie ou plutôt avec une perfidie inqualifiable ces absurdes rumeurs. Non-seulement on ne produisait aucune preuve de ces deux conspirations dérisoires, mais encore le raja n’a jamais été informé de l’existence de ces deux nouveaux chefs d’accusation.

La perte de ce malheureux prince était arrêtée, ou du moins consommée. En 1839, il reçut l’ordre de se présenter devant sir James Rivett Carnac, alors gouverneur de Bombay, à Sattara même, et là on lui remit, non pas les copies demandées avec tant d’instance, mais un papier par lequel il était requis de se reconnaître coupable d’avoir entretenu des relations hostiles au gouvernement britannique. Cet aveu lui eût conservé son trône, on le lui promettait du moins. Pertaub-Sing se contenta de répondre avec indignation : « Le gouvernement britannique m’a donné le territoire sur lequel je règne, il peut me l’ôter ; mais il y a deux choses que je ne ferai jamais à sa requête : renoncer à ma religion et confesser que j’ai violé mes engagemens envers lui. » Là-dessus, Pertaub-Sing fut détrôné et dépouillé de ses propriétés particulières.

Certes, voilà un acte de justice tout-à-fait oriental ; aussi fut-il assez mal accueilli en Angleterre, dans l’Inde même. Lord Auckland et sir Robert Grant, l’un gouverneur-général, et l’autre gouverneur de Bombay au temps de cette catastrophe, se sont exprimés sur les détails de cette affaire, à plusieurs reprises, d’une façon non équivoque ; ils ont déclaré qu’il était impossible de savoir si le raja était véritablement coupable tant qu’on ne lui aurait pas remis entre les mains les pièces de l’accusation, tant qu’on n’aurait pas reçu de lui des réponses écrites sur les diverses charges accumulées contre lui. N’est-ce pas avouer, en d’autres termes, qu’on a condamné Pertaub-Sing sans l’entendre, sans même l’instruire suffisamment des premières dépositions qui l’accusaient, sans lui communiquer celles qui aggravèrent plus tard sa cause, déjà si compromise ?

Aujourd’hui ce ; n’est plus devant le gouvernement de l’Inde, c’est en pleine Europe que la cause est portée. Las d’implorer vainement la révision d’un jugement entaché d’illégalité, le raja en a appelé au parlement[1]. Depuis deux ans, il demande à plaider devant une cour moins prévenue, pour obtenir d’être jugé comme le dernier des sujets de sa majesté britannique ; là se bornent ses réclamations : est-ce trop exiger ? Un agent (wakeel) envoyé par lui, un fondé de pouvoir établi en Angleterre pour conduire ce procès, le Mahratte Rungo-Bapojee, présente au parlement, à la reine elle-même, les pétitions de son maître. Ce beau rôle d’ambassadeur d’un roi exilé, il le remplit avec zèle et courage. Une très petite partie de la presse anglaise a osé lui prêter son appui, car on assure que les journaux de Londres sont en général trop bien traités par la cour des directeurs pour ne pas se montrer reconnaissans.

Maintenant recherchons les causes qui ont pu déterminer la commission à agir avec tant de précipitation et, pour ainsi dire, de violence, et abordons l’affaire sous ses divers points de vue. Quiconque sait comment les choses se passent dans l’Inde aura été porté à croire, d’après un rapide examen des faits, que le raja a véritablement conspiré contre le gouvernement britannique, et qu’une politique prudente a pu tenir secrets les détails d’intrigues qu’il est toujours dangereux de divulguer. Il est si naturel que les souverains tenus en charte privée dans le palais de leurs ancêtres s’ennuient de la tutelle des dominateurs et prêtent l’oreille aux aventuriers qui leur parlent d’indépendance ! Tout en reprochant à la commission d’avoir brusqué la marche ordinaire des lois, on a dû admettre que la justice avait été sommairement rendue, et qu’à cela près des formes ouvertement violées, le jugement ne troublait guère la conscience de ceux qui l’ont porté. Cependant voilà que de toutes parts des documens arrivent ; de terribles accusations sont formulées contre ceux qui ont dirigé cette procédure étrange, et des voix généreuses s’élèvent, qui parlent hautement de témoins subornés, d’une correspondance supposée, d’un sceau contrefait ! Alors on s’explique cette obstination des juges à ne pas revenir sur ce honteux passé et cette persévérance de l’accusé à demander justice.

Jusqu’en 1837, nous l’avons vu, Pertaub-Sing, placé sur le trône par les autorités britanniques depuis dix-neuf ans, ne cessa de recevoir, de la part du gouverneur de Bombay d’abord, puis de la cour des directeurs, d’honorables témoignages de satisfaction et même d’estime. Cependant, en 1832, le raja avait réclamé à Bombay la possession de certaines parties de territoire qui lui étaient dues, d’après l’interprétation naturelle des traités. Trois résidens qui avaient successivement passé à Sattara, et la cour des directeurs elle-même, appuyèrent les justes prétentions du raja. Après une résistance opiniâtre, le gouverneur de Bombay, qui semblait vouloir ne plus tenir ses propres engagemens, fut contraint d’obéir aux injonctions venues de Londres. Inde irae. En 1835, six petits fiefs ou Jagheers de ses états se trouvant sans maîtres, Pertaub-Sing en demanda l’investiture ; le gouvernement de Bombay promit d’en écrire à Londres. Une année s’écoula sans qu’on répondît aux questions réitérées du prince indien autrement que par des promesses mensongères : on n’avait point adressé à Londres ses réclamations. Dans son impatience, il eut la pensée téméraire d’envoyer lui-même un émissaire à la cour des directeurs. Le gouvernement local s’émut de tant d’audace : si les princes de l’Inde se permettent d’accréditer ainsi des agens près de la cour suprême et d’exposer leurs griefs en pleine Europe ; si les affaires de la compagnie se débattent au grand jour, et que les secrets de cette administration mystérieuse se divulguent bruyamment, il pourrait se faire que mainte fois la politique de l’empire d’Orient fût désavouée par l’empire d’Occident. On n’a pas toujours, à Londres, la conscience aussi large qu’à Bombay, à Madras et à Calcutta. On a, en Europe, un rôle de modération, de justice, de civilisation et même de piété à soutenir ; les raisons d’état parlent moins haut, quand on a des témoins de toutes ses actions. Le raja avait fait une imprudence : cet homme tant prôné pour sa belle conduite, pour sa fidélité à garder sa parole, devint tout à coup un conspirateur, un brouillon qui appelait aux armes le Portugal et la Russie !

Cette première faute était grave ; Pertaub-Sing en commit une seconde : ce fut de se mettre en hostilité avec les brahmanes à propos de certaines cérémonies ; peut-être aussi s’attira-t-il leur haine, parce qu’il donnait aux jeunes gens de ses états une éducation un peu trop européenne. Les brahmanes sont plus que la caste sacerdotale, ils sont l’aristocratie véritable des pays de l’Inde. Le raja les avait blessés ; ils résolurent de se venger. De ces deux haines soufflant de deux points opposés se forma l’orage qui renversa le prince de Sattara. Dans la première des deux attaques dirigées contre lui, un brahmane s’était porté accusateur. Bientôt un système complet d’espionnage ou plutôt d’inquisition politique fut établi à Sattara ; des ennemis publics du raja figuraient parmi ceux à qui on promettait des récompenses et des indemnités, s’ils pouvaient fournir des preuves quelconques de ses prétendus desseins. Les témoins affirmaient avoir été appelés par le raja, qui cherchait à les entraîner dans une conspiration en les dégageant de leur serment de fidélité envers les autorités britanniques. Où s’était passée la conférence ? Au rez-de-chaussée, disait l’un ; dans la salle d’en haut, affirmait l’autre ; celui-ci déclarait que Pertaub-Sing était nu jusqu’à la ceinture ; celui-là, qu’il portait un vêtement de cour sur ses épaules. Tout l’ensemble de l’interrogatoire présentait de pareils désaccords ; c’était une comédie mal jouée par des traîtres qui ne savaient pas leurs rôles, et cette triste comédie, on affectait de la prendre au sérieux ! Il y a plus : on sait aujourd’hui ce que coûtèrent ces faux témoignages : à un voleur de grand chemin on offrit cent cinquante roupies comptant et de belles espérances pour l’avenir, s’il voulait déposer contre son maître. À ce propos, M. George Thompson[2] s’écria en pleine assemblée, avec une véritable éloquence : « C’était proclamer dans le pays que quiconque voudrait causer la ruine de son roi n’avait qu’à paraître et à tendre la main ; il serait accueilli à bras ouverts par le résident, et recevrait une riche récompense pour sa trahison ! » Ce résident, c’était le lieutenant-colonel Ovans.

Le même agent politique intercepta toute la correspondance du raja ; aucune lettre ne parvint à celui-ci sans avoir été lue par le lieutenant-colonel Ovans. De cette lecture assidue des papiers les plus intimes de l’accusé est-il au moins résulté quelque preuve qui autorisât ces soupçons accueillis avec tant de facilité, qui corroborât ces témoignages préparés d’avance, mais peut-être vrais sur quelque point ? Rien sans doute, car avec ces lettres écrites de sa propre main on eût confondu le coupable, et au contraire on s’obstina à ne pas lui communiquer les pièces du procès.

Mais on ne devait pas s’en tenir là, on en vint jusqu’à acheter d’un chef de brigands de faux papiers et un sceau dont il se trouvait détenteur. Voici le fait. Pendant de longues années, le raja de Sattara avait, disait-on, entretenu, près du gouverneur de Goa, un agent qui allait, et venait assez régulièrement de la capitale du prince mahratte au chef-lieu des établissemens portugais, et transmettait à Pertaub-Sing des lettres de don Manoel. A son départ de l’Inde, don Manoel avait reçu, ajoutaient les dénonciateurs, une assez forte somme du raja sous forme de présent d’adieu, et, l’agent mystérieux étant mort quelque temps après, les papiers et le sceau de son maître (assez imprévoyant pour ne pas les retirer !) avaient passé entre les mains d’un certain Balboka-Kelkur[3]. Quel était cet homme devenu dépositaire des secrets du raja, ou au moins recéleur de la pièce la plus importante du procès ? Un chef de brigands qui rassemblait des gens de son espèce pour enlever à main armée des trésors déposés dans les forts de Vingorla, Malwan et Ranee. Cinq personnes, arrêtées pour cette affaire, déclarèrent que le prétendu agent du raja près du gouverneur portugais avait le premier préparé ce coup de main ; qu’à la mort de l’agent, Balboka s’était mis à la tête de la bande, et que, voyant ses complices arrêtés, il s’était caché dans les montagnes. Que fit-on alors ? On ne poursuivit pas Balboka, on ouvrit des négociations avec lui, on lui promit sa grace, s’il livrait les papiers et le sceau ; le marché fut conclu au prix d’une somme de 1,000 francs (400 roupies). Encore une fois, pourquoi le raja ne chercha-t-il point à rentrer en possession de ces lettres qui le trahissaient et le condamnaient plus que toutes les vagues dépositions des témoins ? pourquoi, au contraire, le résident voulait-il à tout prix les arracher à celui qui en était le détenteur ? Croyait-il réellement à la culpabilité du raja, et espérait-il mettre enfin la main sur ces preuves qui le fuyaient sans cesse ? Je ne sais, mais il est notoire que les lettres étaient supposées, et que cette machination fut conduite par un espion et par un agent secret du résident lui-même. Ces papiers ne furent jamais communiqués au raja ; le résident ne voulut pas s’en servir, il est vrai, mais il n’avertit point son gouvernement qu’une troupe de sujets de Pertaub-Sing, résolus à le perdre, conspiraient de leur mieux, et exploitaient, par toute sorte de moyens, le mauvais vouloir des autorités britanniques. Il arrêta la poursuite de ces traîtres, de ces faussaires, et devint leur complice par son silence. Dans une cause simple, naturellement et légalement jugée, se rencontrerait-il de pareils incidens ?

On voit quelle double inimitié menaçait incessamment Pertaub-Sing. Le résident eût-il été de bonne foi dans sa conviction que le raja conspirait, de semblables découvertes devaient suffire à éveiller des doutes dans son esprit ; mais cette persuasion, on peut croire qu’il ne l’avait pas, qu’il ne l’a jamais eue comme preuve, nous citerons une particularité caractéristique de ce procès. Un personnage de haut rang, nommé Govind-Rao, jouissait de la confiance du raja ; il fut immédiatement compris dans l’accusation portée en 1836 par les officiers natifs du 23e régiment d’infanterie. Lui aussi, disaient-ils, il avait cherché à tourner les cipayes contre les Anglais. On l’arrêta à l’instant, on l’enferma dans un cachot, ou plutôt dans une tombe, in a living tomb ; là, on le tint au secret le plus absolu, puis on le transféra à Poonah, et, en dernier lieu, à Ahmed-Nugger, sous bonne escorte. Défense était faite de le laisser communiquer avec qui que ce fût ; des ordres étaient donnés pour qu’on interceptât sa correspondance, qui devait être remise au gouvernement. Pendant que Govind-Rao subissait ainsi les rigueurs du carcere duro, le parti qui complotait la ruine du raja fit parvenir au gouvernement anglais une pétition qu’on disait écrite par la mère de Govind-Rao, dans laquelle, tout en déclarant son fils coupable des crimes qui lui étaient imputés, elle demandait sa grace. Cette pétition fut reconnue fausse d’un bout à l’autre, et, en lisant les lettres du lieutenant-colonel Ovans, qui prétend voir dans ce document apocryphe « la confession véritable de Govind-Rao, » on se demande si cet agent, aveuglé par ses préventions ou troublé par la complication des intrigues dont il s’était fait le centre, a bien pu être dupe de pareilles manœuvres Toujours est-il qu’il ajouta foi à la pétition. Cependant il fallait que Govind-Rao lui-même consentît à se reconnaître complice des conspirations supposées. La prison pouvait avoir agi sur lui, il était temps d’essayer de nouveaux moyens. Voilà que tout à coup les portes du cachot, si rigoureusement fermées, s’ouvrent pour en livrer l’entrée à un émissaire secret, oncle du captif à la vérité, mais partisan d’Appa-Sahib, frère du raja, à qui l’on avait promis le trône dès qu’il serait vacant. Pendant plus de quinze jours, cet agent fut librement admis près de Govind-Rao, puis il le quitta pour remettre au gouvernement un papier qui contenait, comme on le devine, la confession sincère, l’aveu complet de toutes les fautes reprochées au prisonnier d’état. On le mit en liberté, sur cette déclaration, dix jours après que Pertaub-Sing avait été détrôné ; mais, quand on l’interrogea sur cette conspiration dont il pouvait désormais parler sans rien craindre ni pour lui, ni pour le prince expulsé, il éclata de rire. Chose singulière, il avait gardé le silence dans sa prison de Sattara et dans celle de Poonah ; c’est dans le donjon d’Ahmed-Nugger, où il n’était plus seul, qu’il avait écrit cette confession, dont il riait lui-même une fois délivré. Ce n’est pas tout. En juillet 1845, Govind-Rao a adressé à la cour des directeurs une pétition, signée de sa propre main, par laquelle il nie avoir jamais écrit la première ; de cette conspiration, jamais il n’en a entendu parler, et il déclare que l’idée fixe du gouvernement de Bombay a été « de causer la ruine de son maître à tout prix, determined on the ruin of my master, at all events.

Il y aurait peut-être encore un moyen de justifier la conduite des autorités britanniques. Si de faux témoins s’étaient levés effrontément pour calomnier le raja Pertaub-Sing, le lieutenant-colonel Ovans et le gouvernement de Bombay avec lui pouvaient se laisser tromper par des rapports mensongers. Cette supposition une fois admise, au lieu d’avoir tenu une conduite inqualifiable, le résident eût joué simplement le rôle d’une dupe malveillante. Mais pourquoi celui-ci a-t-il emprisonné des serviteurs du raja sans l’en avertir ? pourquoi n’a-t-on pas admis la défense de l’accusé ? pourquoi lui a-t-on toujours refusé la communication des pièces du procès ? pourquoi l’a-t-on lui-même tenu au secret dans son palais, sans lui donner avis des conspirations ourdies contre sa personne, à mesure qu’on découvrait quelque trame de cette mystérieuse intrigue ? pourquoi M. Ovans, pleinement convaincu de la fausseté de la pétition attribuée à Govind-Rao, a-t-il attendu onze mois pour dénoncer cette intrigue à son gouvernement ? N’est-ce pas d’ailleurs sur ces dénonciations frauduleuses qu’il a obtenu des autorités supérieures de pleins pouvoirs pour incarcérer les personnes accusées ? Qui donc régnait véritablement à Sattara, du roi, confiné dans son palais, entouré d’espions, de parjures, privé de ses amis, menacé par le procès formidable dans lequel on recevait des dénonciations de toutes mains, ou du résident, qui communiquait seul avec le gouvernement de Bombay, écoutait les délations, et s’interposait avec une autorité absolue entre l’accusation et la défense ?

On connaît maintenant les charges qui s’élèvent contre le résident Ovans ; le parlement n’a pas employé moins de quatre volumes in-folio au complet développement de cette affaire. Quant aux intrigues que le raja est censé avoir entretenues avec le gouverneur de Goa, don Manoel, celui-ci a affirmé n’en rien connaître. Un membre du parlement, M. Joseph Humes, lui ayant demandé des explications sur ce sujet, a reçu une lettre catégorique dans laquelle on lit ces mots - « Au nom de la justice et pour mon honneur, je me fais un devoir de déclarer que, durant tout le temps que j’ai gouverné les possessions portugaises dans l’Inde, je n’ai jamais entretenu de correspondance sur aucun sujet politique avec le raja de Sattara, et tous les documens qui ont été produits à l’appui de cette assertion sont faux[4]. » On prétend que le lieutenant-colonel Ovans n’a voulu voir, dans la parole du fidalgo portugais, autre chose que le témoignage douteux d’un complice, et cependant il veut qu’on le croie sur sa propre parole, lui, qu’on accuse d’avoir trompé son gouvernement dans mainte occasion, et cela, non pour sauver un innocent, mais pour faire tomber de son trône un pauvre raja !

De tels débats ne se poursuivent point sans que les partis se livrent des combats acharnés ; la lutte est ouverte entre ceux qui veulent jeter un voile sur le passé et ceux qui croient plus sage, plus juste, plus généreux, de la part d’un grand peuple, de rechercher la vérité en dehors de toute autre considération. En 1841, devant la cour des propriétaires réunis à l’East-India-House, M. George Thompson prononça un discours plein de mouvemens oratoire et d’allusions historiques, qui mirent la cause à sa véritable hauteur ; il fit voir qu’il y a solidarité complète entre le gouvernement de l’Inde et celui de Londres. Il terminait son speech en demandant à la cour d’émettre l’opinion que « l’ex-raja de Sattara était innocent des accusations portées contre lui… et qu’en conséquence, d’après les principes de la loi anglaise, fondée sur l’immuable justice, et les droits inaliénables de tout sujet britannique, prince ou paysan, il était digne d’être réintégré dans tous ses droits et réhabilité pour tous les torts qu’on avait eus envers lui[5]. » Une année après, à la demande de neuf propriétaires, cette motion fut formulée : « La cour est-elle d’avis que le raja de Sattara a été privé de ses propriétés et exilé sans avoir été entendu, et que de pareils actes sont aussi répugnans aux principes de la justice que nuisibles aux intérêts anglais dans l’Inde ? » Sous prétexte que la cour avait résolu de ne plus se mêler d’une affaire trop souvent évoquée, la majorité refusa de prendre cette demande en considération. Là-dessus une discussion s’éleva, et, d’accord avec M. Thompson, qui s’est fait l’avocat officieux et désintéressé de Pertaub-Sing, M. Norris, honorablement connu à Bombay, où il a rempli de hautes fonctions, revint à la charge, discuta tous les points de cette procédure illégale, et troubla dans leur somnolence les adversaires de sa motion[6]. Le parti des mécontens se grossissait peu à peu, et le temps, sur qui on comptait pour endormir l’affaire, déjouait les prévisions de tous ceux qui disaient : Justice est faite !

Cette même année, le raja adressa à la reine une pétition signée, non de son sceau, mais de sa main[7]. Cette humble adresse d’un prince fier par caractère et par naissance est curieuse à étudier ; on y trouve des traces profondes de cette mélancolie qu’inspire le malheur présent comparé avec la gloire et la grandeur passées. « Celui qui fait cette pétition, dit-il tout d’abord, est de race royale ; il ne désire point être traité avec faveur, il demande seulement à être jugé sans partialité, afin que, comme le dernier sujet de votre majesté accusé d’un crime, il puisse être tenu pour innocent tant qu’il n’y a pas de preuves de son délit. » Et plus loin il ajoute : « Comme les autres princes de l’Inde dont les états ont été écourtés (curtailed), le pouvoir amoindri, et qui ont été réduits à se courber sous l’ascendant britannique, celui qui fait cette pétition doit tout son territoire, tout le pouvoir dont il a jamais joui, toute la dignité dont il a jamais été entouré, au gouvernement de la Grande-Bretagne. » -Mieux qu’aucun de ses défenseurs, le raja fait ressortir la part qu’ont prise les brahmanes dans les attaques dirigées contre lui, et il prouve que son trône devait s’appuyer sur le concours des autorités britanniques, tandis que le seul fait de son élévation le mettait en hostilité directe avec la caste la plus influente de l’Inde, et lui ôtait tous les moyens dont il pouvait se servir pour soulever ses peuples contre la domination anglaise. C’est au nom de l’histoire qu’il parle ; les Pechwas, qui avaient usurpé le trône, appartenant à la caste brahmanique, l’installation d’un prince d’une autre caste diminuait l’autorité de cette puissante aristocratie, et la jetait dans une opposition systématique. De là sont partis les coups que, loin de détourner, on semble avoir pris à tâche de diriger contre le raja. Il expose en peu de mots les difficultés de sa situation, et sourit tristement à cette folle idée qu’on lui prête, d’avoir voulu tenter une attaque contre une puissance formidable avec ses propres forces, montant à quinze cents hommes, soutenus par les troupes des Portugais, dont l’effectif ne va pas au-delà de trois cents fantassins ! Il s’étonne que son prétendu complice ait été à peine interrogé sur une matière aussi grave, et nous nous étonnons avec lui qu’une pareille hostilité, même soupçonnée, de la part du gouverneur de Goa, n’ait pas amené entre les cabinets de Londres et de Lisbonne une explication quelconque. Il y a long-temps cependant que l’Angleterre n’a plus peur du Portugal.

En 1843, l’agent de Pertaub-Sing, Rungo-Bapojee, prononça un discours en mahratte à l’East-India-House. Il demanda pourquoi les papiers relatifs à la cause avaient été cachés, pourquoi on s’obstinait à ne pas les montrer publiquement, quand des défenseurs généreux osaient, avec tant de hardiesse et de désintéressement, dévoiler la conduite des persécuteurs de son maître. Envoyé par l’ex-raja, qui, comme tous les princes de l’Inde, s’était accoutumé à l’idée qu’on obtenait justice en Angleterre, il espérait qu’une enquête serait enfin ordonnée. Une lettre lui apprenait que le raja actuel, privé de postérité, se trouvant dangereusement malade, voulait adopter un fils ; pouvait-il le faire tant que Pertaub-Sing n’aurait pas été admis à prouver son innocence ? Un gouverneur de Bombay avait donné à entendre qu’au décès du présent roi, mort sans successeur légitime, le royaume de Sattara retournerait à la compagnie, selon la loi ; la maladie de ce dernier prince d’une dynastie sans postérité réveillerait-elle la cupidité des directeurs ? Telles étaient les questions qu’il proposait à l’assemblée ; dans cette même séance du 8 février 1843, M. Sullivan prit la parole pour soutenir une motion ainsi conçue : « Après un mûr et attentif examen de toutes les circonstances de l’affaire du raja de Sattara, cette cour est d’avis que la justice, non moins que le caractère du gouvernement britannique dans l’Inde, requiert, ou que le susdit raja soit replacé sur le trône, ou qu’une complète et impartiale enquête soit faite sur toute la marche de ce procès[8].

L’opinion de M. Sullivan avait un grand poids : membre du conseil de Madras vers cette époque, il savait qu’une conspiration avait été ourdie contre le gouvernement britannique par plusieurs rajas, et, quand le nom de Pertaub-Sing fut prononcé avec celui des princes rebelles, il ne douta pas un instant que le chef mahratte n’eût trempé dans ce complot. Telle fut la première impression de M. Sullivan, jusqu’à ce que les dénonciations faites devant la cour des propriétaires lui eussent ouvert les yeux. Il n’hésita pas à changer d’idée, à revenir sur des préventions assez fondées, et, après avoir été accusateur tacite de l’ex-raja, il se fit hautement son défenseur.

Vous le voyez, de ces documens il résulte qu’il y a eu illégalité flagrante dans la procédure, et que la commission se refuse obstinément à réviser l’affaire, c’est-à-dire à se disculper de la terrible accusation qui pèse sur elle. Les divers plaidoyers en faveur de Pertaub-Sing montrent clairement le côté faible de la question. Les accusateurs de M. Ovans ne peuvent avoir aucun intérêt à diffamer un de leurs concitoyens, à prendre en mains le parti d’un petit prince détrôné ; mais ils s’obstinent d’autant plus dans leurs attaques parfois très violentes, que le mauvais vouloir de la cour des propriétaires se manifeste plus sensiblement. Ainsi, à la séance trimestrielle du mois de septembre, la cour des directeurs tenta d’interdire l’entrée de la salle aux étrangers, et de repousser de son sein les petits actionnaires de la compagnie. Il s’éleva de si énergiques réclamations contre cette mesure aristocratique, qu’on revint sur la première décision, et, dans cette même séance, M. Thompson put élever la voix, au sujet du raja, devant un auditoire moins intéressé à repousser sa motion. Dans une réunion spéciale de directeurs, où il s’agissait de délibérer sur cette question toujours pendante, il y eut usurpation de fauteuil par un des membres, dispute entre le président et celui qui occupait sa place par surprise, enfin désordre complet, si bien que la chose fit du bruit, et la noble cour, déjà accusée d’une partialité évidente, compromit sa dignité. Mais un fait plus grave pour l’honneur de cette cour, c’est que, sur quarante-six votans, quinze seulement, le tiers à peine, ont soutenu la cause du raja ; vingt-et-un membres ont déclaré qu’il n’y avait pas lieu à s’occuper davantage de cette affaire, qui entraînait avec elle de graves inconvéniens ! Il y a sans doute aussi quelques graves inconvéniens pour l’accusé à subir une condamnation que sept directeurs[9] eux-mêmes ne regardent pas comme justement méritée.

Dans ce rapide aperçu d’un important débat, j’ai cru devoir omettre des détails mesquins, scandaleux, qui donneraient plus de force encore à l’accusation portée contre les autorités britanniques ; il m’a paru préférable de maintenir la question à la hauteur d’un grand procès politique, et d’étudier les faits dans leur ensemble, en les dégageant de tout ce que l’histoire oubliera. Le public, l’Europe entière, en savent assez aujourd’hui pour comprendre ce qui a porté les membres de la cour à rejeter avec dégoût, à une grande majorité, la révision de cette cause fastidieuse, disent-ils, et suffisamment étudiée. Cependant il y a un précédent à l’affaire du raja de Sattara, et cette seule circonstance devrait soulever des scrupules dans l’esprit des juges. En 1787, le fils adoptif d’un raja de Tanjore, légitimement admis à succéder à son père, d’après la loi hindoue, et confié à la garde du missionnaire Swartz, fut déposé presque immédiatement, à la demande de son oncle, à peu près comme Pertaub-Sing l’a été par suite des intrigues auxquelles son frère, Appa-Sahib, n’est pas resté étranger. Cette sentence, le gouvernement de Madras l’adopta, la cour des directeurs la confirma ; elle ne tarda pas à être sanctionnée par le gouvernement suprême. Malgré cela, une minorité bien faible persista à soutenir que cette sentence avait été achetée, au moyen de grosses sommes d’argent, par de faux témoignages, par ces ténébreuses machinations dont l’Asie a gardé le secret. Pendant sept années, ceux qui demandaient justice implorèrent vainement l’attention du gouvernement de l’Inde. A la fin, leur obstination triompha de l’indifférence des autorités britanniques ; on révisa la cause, on découvrit des menées frauduleuses que personne ne supposait, pas même le missionnaire Swartz, défenseur naturel, tuteur légal du jeune prince. Le raja, convaincu d’avoir trompé la justice, fut déposé à son tour, et le fils adoptif du roi précédent remonta sur le trône de son père douze ans après qu’un complot habilement ourdi l’en avait fait descendre[10]. Dans cette affaire déjà ancienne, on n’avait aucune raison de soupçonner que la bonne foi des juges eût été surprise ; dans celle-ci, on fait plus que soupçonner une illégalité, on la voit se reproduire sous toutes les formes à chaque nouvelle phase du procès. Mais il n’y a que sept ans à peine que le raja crie du fond de son exil ; encore quelque temps, et il se peut qu’il meure : alors, sans doute, on considérera sa cause comme doublement jugée, et une grande iniquité aura été commise à la face du monde par le gouvernement de l’Inde. Plaise à Dieu que ce soit la dernière !


Théodore Pavie.

  1. Dans son ouvrage sur l’Inde, M. Fontanier avait dit quelques mots de cette affaire ; mais, ayant quitté Bombay en 1840, il n’a pu s’étendre sur les détails qu’une enquête postérieure a dévoilés.
  2. Discours à l’East-India-House, octobre 1845.
  3. Official papers appertaining to the case of the detroned raja of Sattara, with a brief statement o f the case, pag. 2 et 3. — A Statement of the case of the deposed raja of Sattara, taken from the official papers printed by parliament and by the court of directors, etc., by W. Nicholson ; esq. N. A. ; London, 1845, pag. 81-82.
  4. Statement of the case of the dethroned raja of Sattara, etc, W.-N. Nicholson, 1845.
  5. Speech delivered in the court of proprietors as the East-India-House, july 15, 1841, by George Thompson, esq.
  6. Case of the raja of Sattara, speech of the late Charles Norris, esq., 1842.
  7. The deposed raja o f Sattara. Statement of his case by his Highness, 1842.
  8. Speech of M. John Sullivan, in the court of proprietors at the East-India-House, on the 8 of february 1843.
  9. Les directeurs sont au nombre de vingt-quatre ; tous n’étaient pas présens à la séance.
  10. Speech of M. John Sullivan, etc., pag. 3 et 4.