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262 SULLY PRUDHOMME

Ainsi s'établit spontanément la conciliation du Bonheur et de la Justice. Les deux poèmes abou- tissent à la même conclusion pacifique et le pes- simisme qui les contracte s'épanouit dans la séré- nité. La pensée du poète était d'abord accablée par la banqueroute de nos désirs de justice devant les scandales de la violence et par la fragilité de la prise humaine sur le bonheur toujours expi- rant. Mais l'idée de loi lui apporte la solution de l'énigme et le remède des amertumes, car elle se dépouille, de plus en plus de ses formes dures et mornes et resplendit devant ses yeux par des manifestations qui sillonnent à travers le monde la marche de la conscience et de la fraternité. La loi est d'abord le signe et le triomphe de la force. Elle apparaît ensuite comme le lien indissoluble des disciplines naturelles. Elle devient enfin l'expression de la justice et la garantie du bonheur par la conciliation du sacrifice et du droit. Devant l'esprit du poète, si torturé et enfin ravi, la volonté de la loi monte comme un élan d'amour. C'est ainsi que son œuvre, suivant la marche de la vie vers la lumière, se déploie selon l'harmonie d'une architecture dont l'idée de loi forme à la fois le fondement et la clef de voûte.