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LES ROUGON-MACQUART

À propos, Foucarmont, vous allez nous dire ça : Vandeuvres pariait qu’elle n’avait pas de cuisses.

Cette pose au cynisme ennuyait ces messieurs. Foucarmont se contenta de répondre :

— Interrogez votre cousin, mon cher. Justement le voilà.

— Tiens ! c’est une idée, cria la Faloise. Je parie dix louis qu’elle a des cuisses.

Fauchery arrivait, en effet. En habitué de la maison, il avait fait le tour par la salle à manger, pour éviter l’encombrement des portes. Repris par Rose, au commencement de l’hiver, il se partageait entre la chanteuse et la comtesse, très las, ne sachant comment lâcher l’une des deux. Sabine flattait sa vanité, mais Rose l’amusait davantage. C’était, d’ailleurs, de la part de cette dernière une passion vraie, une tendresse d’une fidélité conjugale, qui désolait Mignon.

— Écoute, un renseignement, répétait la Faloise, en serrant le bras de son cousin. Tu vois cette dame en soie blanche ?

Depuis que son héritage lui donnait un aplomb insolent, il affectait de blaguer Fauchery, ayant une ancienne rancune à satisfaire, voulant se venger des railleries d’autrefois, lorsqu’il débarquait de sa province.

— Oui, cette dame qui a des dentelles.

Le journaliste se haussait, ne comprenant pas encore.

— La comtesse ? finit-il par dire.

— Juste, mon bon… J’ai parié dix louis. A-t-elle des cuisses ?

Et il se mit à rire, enchanté d’avoir mouché tout de même ce gaillard, qui l’épatait si fort jadis, quand il lui demandait si la comtesse ne couchait avec per-