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LES ROUGON-MACQUART.

grasse rôtie. On en causait avec des yeux gourmands. Même, l’oie était achetée. Maman Coupeau alla la chercher pour la faire soupeser à Clémence et à madame Putois. Et il y eut des exclamations, tant la bête parut énorme, avec sa peau rude, ballonnée de graisse jaune.

— Avant ça, le pot-au-feu, n’est-ce pas ? dit Gervaise. Le potage et un petit morceau de bouilli, c’est toujours bon… Puis, il faudrait un plat à la sauce.

La grande Clémence proposa du lapin ; mais on ne mangeait que de ça ; tout le monde en avait par-dessus la tête. Gervaise rêvait quelque chose de plus distingué. Madame Putois ayant parlé d’une blanquette de veau, elles se regardèrent toutes avec un sourire qui grandissait. C’était une idée ; rien ne ferait l’effet d’une blanquette de veau.

— Après, reprit Gervaise, il faudrait encore un plat à la sauce.

Maman Coupeau songea à du poisson. Mais les autres eurent une grimace, en tapant leurs fers plus fort. Personne n’aimait le poisson ; ça ne tenait pas à l’estomac, et c’était plein d’arêtes. Ce louchon d’Augustine ayant osé dire qu’elle aimait la raie, Clémence lui ferma le bec d’une bourrade. Enfin, la patronne venait de trouver une épinée de cochon aux pommes de terre, qui avait de nouveau épanoui les visages, lorsque Virginie entra comme un coup de vent, la figure allumée.

— Vous arrivez bien ! cria Gervaise. Maman Coupeau, montrez-lui donc la bête.

Et maman Coupeau alla chercher une seconde fois l’oie grasse, que Virginie dut prendre sur ses mains. Elle s’exclama. Sacredié ! qu’elle était lourde ! Mais elle la posa tout de suite au bord de l’établi, entre un