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L’ASSOMMOIR.

de rire de ces vermines-là, pendant l’après-midi, elle les enleva de nouveau, les serra contre elle, prise d’une rage de tendresse.

— C’est drôle pour Coupeau tout de même, disait madame Lorilleux aux autres dames, dans le fond du salon.

Gervaise avait gardé sa tranquillité souriante de la matinée. Depuis la promenade pourtant, elle devenait par moments toute triste, elle regardait son mari et les Lorilleux de son air pensif et raisonnable. Elle trouvait Coupeau lâche devant sa sœur. La veille encore, il criait fort, il jurait de les remettre à leur place, ces langues de vipères, s’ils lui manquaient. Mais, en face d’eux, elle le voyait bien, il faisait le chien couchant, guettait sortir leurs paroles, était aux cent coups quand il les croyait fâchés. Et cela, simplement, inquiétait la jeune femme pour l’avenir.

Cependant, on n’attendait plus que Mes-Bottes, qui n’avait pas encore paru.

— Ah ! zut ! cria Coupeau, mettons-nous à table. Vous allez le voir abouler ; il a le nez creux, il sent la boustifaille de loin… Dites donc, il doit rire, s’il est toujours à faire le poireau sur la route de Saint-Denis !

Alors, la noce, très égayée, s’attabla avec un grand bruit de chaises. Gervaise était entre Lorilleux et M. Madinier, et Coupeau, entre madame Fauconnier et madame Lorilleux. Les autres convives se placèrent à leur goût, parce que ça finissait toujours par des jalousies et des disputes, lorsqu’on indiquait les couverts. Boche se glissa près de madame Lerat. Bibi-la-Grillade eut pour voisines mademoiselle Remanjou et madame Gaudron. Quant à madame Boche