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CLARA ZETKIN

pression qu’avaient faite sur moi les déclarations de Lénine au sujet de l’art, de la civilisation, de l’instruction publique. « Avec quelle sincérité et quelle chaleur il aime le peuple du travail ! » Voilà la réflexion qui traversait mon esprit, alors que la tête échauffée, revenant chez moi par la nuit froide, je me remémorais ses propos. Et dire qu’il y a des gens qui prennent cet homme-là pour une froide machine à raisonner, pour un fanatique rigide imbu de formules qui ne voit dans les hommes que des « catégories historiques », et qui dispose d’eux dans ses calculs et dans ses jeux aussi froidement que si c’était des billes !

Une autre conversation avec Lénine est restée gravée dans ma mémoire et ne s’en effacera pas. J’avais été éprouvée, comme beaucoup d’Occidentaux venus à Moscou à cette époque-là, par le changement complet de genre de vie, et j’étais obligée de garder le lit. Lénine vint me rendre visite. Plein de sollicitude, comme la meilleure des mères, il voulut savoir si j’étais soignée et nourrie comme il fallait, si j’avais un bon médecin et si je ne désirais rien. J’apercevais derrière lui la chère figure de la camarade Kroupskaïa. Lénine doutait que tout fût vraiment si bien que je le lui disais. Il était fâché en particulier de me trouver logée au 4e étage d’un immeuble soviétique qui avait bien un ascen-