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CLARA ZETKIN

Lénine écoutant, répondant, était d’une patience inépuisable, touchante. Son oreille s’ouvrait à toutes les préoccupations de parti, à toutes les douleurs personnelles, et toujours il avait un bon conseil à donner. Dans ses rapports avec les jeunes, ses façons étaient vraiment parfaites. Il leur parlait en camarade, sans rien qui rappelât le pédant ou le maître d’école, et ne s’imaginant certes pas que l’âge est déjà à lui seul une inégalable vertu. Lénine allait et venait en égal parmi des égaux, auxquels il était attaché par toutes les fibres de son cœur. Il n’avait absolument rien d’un « maître ». Son autorité dans le parti était celle d’un père, à la supériorité duquel on se soumet, parce qu’on a conscience qu’il comprend et veut être compris. Ce n’est pas sans amertume que dans l’atmosphère qui entourait Lénine, le souvenir m’est revenu des grands airs empesés des « pères » de la social-démocratie allemande. Et pis encore, des stupides façons de parvenu du social-démocrate Ebert, de M. le président d’Empire, s’appliquant à singer la bourgeoisie, à « tousser et à cracher comme elle », et abdiquant dans son orgueil de parvenu toute fierté du rôle historique du prolétariat et même toute dignité humaine. Sans doute, ces messieurs n’ont jamais été « aussi fous et aussi présomptueux » que Lénine « voulant faire une Révolution ». Et provisoirement, la bourgeoisie, ce petit enfant de l’ex « Empire Romain », peut sous leur garde ronfler dans sa chambre avec plus de sécurité encore qu’elle ne