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PRÉLIMINAIRE.

ſoit voler mes Cipayes. Pour moi, à qui la crainte ne donnoit point d’ailes, je ſentois toute la fatigue d’une pareille marche. Nous nous trouvâmes enfin à onze heures du ſoir ſur le bord de la riviere Neliceram. À peine mes Cipayes me laiſſerent-ils repoſer au pié d’un arbre en attendant le Canot qui devoit nous paſſer. Les pauvres gens ſe tâtoient encore lorſqu’ils furent dans le Fort, doutant preſque que ce fût eux-mêmes.

Je trouvai mon frere à Neliceram, & le plaiſir que je reſſentis en l’embraſſant me fit bien-tôt oublier le péril auquel je venois d’échapper.

Ma curioſité n’étoit pas ſatisfaite : je m’étois contenté de reconnoître la pierre qui marquoit anciennement les limites du Canara. J’allai la voir une ſeconde fois avec deux Cipayes que l’on eut bien de la peine à déterminer à m’accompagner. Nous partîmes le ſoir, pour n’être pas vûs, & arrivâmes ſur les dix heures dans l’endroit où elle étoit, à une demi-heure de chemin Nord-Nord-Oueſt de Pongaye. Je la deſſinai à la lueur d’une bougie. Cette pierre étoit renverſée. C’eſt une eſpece de colonne qui a quatre pieds, deux pouces de fût, & vingt-trois pouces de baſe. Cette derniere partie devoit être enterrée. Son diamètre eſt de ſeize pouces, neuf lignes. Je n’y vis d’autre figure que celle qui occupe la face ſupérieure depuis environ le milieu du fût juſqu’au haut, & que je crois être un Lingam ou un bâton de Commandement. Je demandai dans la ſuite à des vieillards de Pongaye s’il n’y avoit rien d’écrit ſur la face qui touchoit la terre. Les uns me dirent que Ciapnek ayant trouvé le nom d’un Particulier gravé auprès de ſon Inſcription, avoit tout effacé ; d’autres m’aſſurerent qu’il n’y avoit pas d’autre gravure que celle qui étoit ſur la face ſupérieure. Ils ajoutoient que c’étoit une pierre de Pagode qu’on ne pouvoit remuer ſans s’expoſer à être frappé de mort. Mais j’ai remarqué généralement que ma curiosité les effarouchoit. Quel fonds après cela peut-on faire ſur de pareils témoignages ?

Je paſſai un jour à Neliceram ; le P. Claude, Miſſionnaire Carme, qui étoit à la Côte Malabare depuis