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DISCOURS

gais comme il le méritoit, & mon air aſſuré produiſit l’effet que j’en attendois.

Le 7, à dix heures du matin arriva la réponſe du Commandant de Neliceram. Le Cipaye qui l’apportoit n’eut audience qu’à deux heures après-midi, parce que le Gouverneur étoit allé à quelques lieues de-là accompagné de cinq à ſix cens Cavaliers, examiner une affaire dans laquelle un Nair avoit été tué.

Après la lecture de la Lettre du Commandant François les avis furent partagés pendant quatre heures. Les uns vouloient que l’on écrivit à Mangalor, d’autres qu’on me renvoyât à Karnik, quelques uns qu’on me retint encore : mais le Cipaye de Neliceram avoit répandu dans le Fort, que Mahé étoit informé de ma détention, & que mon frere qui y étoit, alloit venir à Dekle avec un détachement me tirer de leurs mains. Ce bruit ſemé à propos termina la Délibération. À ſix heures du ſoir on m’annonça que je pouvois partir avec mes gens. Le Cipaye de Neliceram fut chargé d’une Lettre pour le Commandant François, dans laquelle le Gouverneur de Dekle ſe faiſoit auprès de lui un mérite de la modération qu’il ne montroit ſûrement que malgré lui.

La viſite des Brahmes, Écrivains & Pions du Gouverneur qui m’étoient venus faire Salam, m’avoit appris que l’heure de ma délivrance approchoit. Il fallut me ſaigner pour répondre à leur politeſſe par de petits préſens.

Mon deſſein d’abord étoit de paſſer la nuit à Dekle ; mais les craintes de mes Cipayes me forcerent de partir. Jamais en effet je ne vis de gens ſi effrayés. Il ſembloit qu’ils euſſent tout le Canara ſur le dos. Ils me dirent nettement que si je voulois reſter, ils alloient me quitter, appréhendant que le Gouverneur ne changeât d’avis, & & ne les envoyât paſſer le reſte de leur vie dans les priſons de Bedrour ; je me rendis à leurs raiſons. Nous prîmes dans l’Eſt de Tchittaye, de Pongaye & de la riviere de Neliceram, marchant dans l’eau juſqu’à la ceinture, plutôt que de nous approcher des Aldées ou des Forts. La plus petite lumiere, le bruit d’un Tamtam éloigné, fai-