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PRÉLIMINAIRE.


les des environs, pillent & brûlent les Aldées. Quelquefois même le Rajah, eſt obligé de ſe racheter du pillage. Ces violences durent juſques aſſez avant dans le Bengale, où, à cauſe des fortes Garniſons & des Troupes qu’ils ſont expoſés à rencontrer, ils fe diſperſent, & portent enfuite chacun dans leur Pays les Indulgences de Jagrenat. De cette maniere, le Rajah, les Brahmes & les Pelerins s’enrichiſſent, pour ainſi dire, par une convention tacite ; & c’eſt comme ailleurs le Peuple qui paie.

L’armée des Fakirs que je rencontrai, etoit environ de fix mille hommes. Je fus arrete par l’avant-garde compofe de quatre cents hommes. Elle etoit fur deux lignes, dans une grande plaine : a la tete, marchoient trois hommes de haute taille, fort bien faits, qui, de la main droite, tenoient une longue pique, & de la gauche, une rondache ; Le refte etoit arme de fabres, d’arcs, de fufils a. meche. Ma petite troupe n’auroit pas brille vis a-vis deux. Ils me demanderent fierement d’où je venois, & où j’allois. Mon Alkara, apres le compliment Religicux, Namounorogne[1], leur montra le palTeport de Rajah Ram Alkara, 6c leur die que je venois de Moxoudabad, que j’etois un Francois echape de la ruine Schandernagor, qui tachois de regagner Pondichery par Ganjam : mon titre d’Envoyé m’auroit nui dans cette occafion, & m’auroit fait fuppofer des richeffes ou des bijoux que je n’avois pas. Mon attirail leur confirma le rapport de l’Alkara : ils baiferent avee refpect la Tchape du Rajah, & me fouhaiterent un bon voyage. Les voyant s’humanifer ainfi, je leur demandai un pafTeport pour le refte del’armee. La propofition leur parut finguliere ; & ; ils me l’accorderent de bonne grace. Pendant plus de deux cofTes, je rencontrai des bagages de toute efpece, efcortes par des bandes de cent & de deux cents Fakirs ; & j’avoue que le pafTeport de l’avant-garde ne me tranquillifoit pas trop fur le zele interefle de ces Devots d’une nouvelle trempe. Je pafTai la nuit à Padempour, eloigne de deux coſſes & demie de

[1] Namo Naraïen, c’eft-à-dire je vous invoque (je vous releve, je benis) Vifchnou. Naraien eft un des noms de ce Dieu, qui eft adoré à la côte d’Orixa, fous le nom & la figure de Khrefchnou.