Page:Zend-Avesta, trad. Anquetil-Duperron, volume 1.djvu/119

Cette page n’a pas encore été corrigée
lxxiij
PRÉLIMINAIRE.


nous ; le premier, jeune homme de dix-huit ans, fait autour, tout couvert de pouſſiere, de cendre & de bouſe de vache, & nud comme la main, nous amuſoit par ſes culbutes & par les tours qu’il faiſoit dans la route. Me ſachant Europeen, il s’etoit attache à ma ſuite, dans l’eſpérance que je le guérirois de certain mal produit par ſon incontinence. Le ſecond Fakir étoit un homme de quarante ans, bon dévot de Jagrenat, qui faiſoit le pelerinage avec une belle Fakirette de dix-huit à vingt ans, qu’il faifoit patter pour fa femme. Une taille haute & déliée, la jambe fine, le bras bien fait, une tete noble, le regard affure & tendre, de grands yeux noirs & pleins de feu, une petite bouche avec des dents du plus bel y voir ; routes ces perfections faifoient prefqu’oublier que cette Fakirette avoit la peau noire. Ses yeux fe fixoient volontiers fur moi, & plufieurs fois elle s’offrit avec une honnete timidite pour faire cuire mon Kicheri. Mais j’étois trop occupe de mon voyage & du perfonnage emprunte que je jouois, pour être fenfible à ces avances. Mon Alkara, petit maitre dans fon efpece, qui portoit la toque haute, toujours le Betel a la main, & : le jarret bien tendu, profita de mon indifference ; 6c le Fakir qui le voyoit fe charger des frais du voyage, parut n’en pas prendre ombrage.

Je partis le 2 Juin de Djaſpour, & trouvai au-dela de cette Aldée le Modaguin, qui fe jette dans la mer, lorfque fon lit eft plein ; il étoit alors a fee. Deux cofles plus loin eft le Karfoiia, riviere confiderable au-dela de laquelle eft Baroiia, petite Aldée avec Tchoki : on voit dans cette Aldée les ruines d’un grand Palais de Mohammed Taki khan, fuivid’une efpece de Fort ou enceinte en terrequi autrefois etoit garnie de canons. À une demi-coffe de-la on pafle des bas-fonds fur un pont de pierre polie,dont les arches font a voute fur hauflee & les quatre coins garnis d’efpeces de niches. Unpeu plus loin eft un Tchoki ; & a une demi-coffe de ce Tchoki, le Bameni, grande riviere gardee par un Tchoki. Au delà eft l’Aldée de Tilfafen.

Je m’arrêtai quelque tems ſur les bords du Bameni ; & ſatisfait des ſoumiſſions de l’Alkara, je lui rendis les Daſtoks.