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LE GRAND HENRI

VII

LE GRAND HENRI

On mène à l’impasse une vie plus confortable et plus douce depuis que Grand’Mère est là, voici deux ans et quelques mois. La femme du serrurier a trouvé là un solide appui sur lequel elle peut se reposer. Il y a des trésors de tendresse et de dévouement dans cette vieille femme demeurée si vigoureuse et active. Elle prend à son compte la plus grande part des travaux de la maison pour les éviter à la mère de famille, un peu lymphatique, un peu fatiguée. Mais c’est surtout sur les enfants qu’elle exerce l’influence de sa sagesse.

— Où avez-vous appris tout ce que vous savez de la vie, Grand’Mère ? demande un jour inconsidérément Marie.

— Dans le malheur, ma petite fille, répond cette femme mystérieuse.

Son chouchou, c’est le gros Claude qui a fait cette année sa première Communion, et qui aime encore à rouler sa lourde tête frisée dans le creux du bras de Grand’Mère, quand elle est assise. Elle seule apaise ses fureurs, ses violences.

— Grand’Mère, je suis jalouse, dit souvent Sabine : vous aimez mieux Claude que moi et même que nous tous.

— Je vous aime tous autant, mes chéris, dit la vieille femme ; mais Claude me rappelle un souvenir de ma jeunesse.

— Vous aviez peut-être un petit frère qui lui ressemblait ?

— C’est cela, répète-t-elle avec une physionomie sou-