III
LA MERCERIE
DE LA RUE DES QUATRE-FRÈRES-PEIGNOT
Le lendemain au petit matin, dès le café au lait servi et les hommes partis vers leur travail, Marie Cervier courait à la mercerie ne se tenant plus d’aller rapporter à sa mère l’aventure de la rescapée, la belle conduite de ses enfants et la générosité de son mari de qui elle ne manquait jamais de monter en épingle le moindre mérite devant Mme Leriche.
— Oui, voilà ce qu’il a fait, mon pauvre mari !
C’était une toute petite boutique si étroite que le seul comptoir l’encombrait à vous empêcher d’y circuler. Les murs tapissés d’au moins cent petits cartons contenaient tout ce qu’il faut aux couturières pour coudre et fignoler leurs ouvrages délicats. Mais le triomphe de Mme Leriche tenait tout entier dans la devanture ou trônait un ravissant mannequin de femme, un buste de jeune fille au sourire ingénu, tous les jours revêtu d’un blouson nouveau mais toujours d’évanescentes couleurs. Des foulards roulés comme des serviettes de restaurant en forme de tiare faisaient alentour une ronde multicolore. Le reste, Mme Leriche l’appelait : « la bricole ». De petits nécessaires de couture, des ongliers, des flacons de parfums, des boîtes à fard, des boîtes à poudre, le tout jeté çà et là au hasard, eût-on dit, mais au fond avec un art savant de la tentatrice. Enfin, il y avait le coin des petits volumes romanesques, celui des cartes postales en couleur et celui des journaux. Là-haut, dans l’un des alvéoles de cette ruche, celui des tissus.
Mme Leriche, petite personne menue dont les che-