Page:Yonge - L'héritier de Redclyffe, Vol 2, 1855.djvu/49

Cette page a été validée par deux contributeurs.
— 43 —

plus haut, et, semblait-il, sur le bord du rocher à pic qui couronnait la scène, on voyait le vieux château gothique, véritable nid d’aigle, et digne habitation des Morville. Le soleil, qui l’éclairait en plein, faisait remarquer combien de fenêtres étaient sans rideaux, et combien le vent de la mer avait rongé les vieux murs. L’aspect majestueux et mélancolique de ce château rappelait tous les sombres événements dont il avait été le témoin ; depuis le jour, où, selon la tradition, les chiens mêmes avaient fui le meurtrier de l’archevêque, jusqu’au soir où l’héritier de la famille avait été ramassé sans vie devant la porte de son père.

Walter, appuyé sur ses avirons, regardait cette scène, le cœur rempli d’un bonheur si grand, qu’il semblait ne devoir pas durer, et n’être pas fait pour un homme tel que lui. C’était comme un rayon d’en haut, trop pur pour être réel, et le jeune homme s’arrêtait comme un enfant en se disant : « Est-ce bien à moi ? » Il craignait de se fier trop, de s’attacher, trop aux biens de ce monde ; il était heureux d’avoir un moment à lui pour réfléchir et pour modérer ses transports, afin d’être toujours prêt à supporter les coups de l’adversité.

Eh bien ! c’était une bonne chose pour lui, de regarder ce vieux château, de se rappeler qui il était, et de penser à la fragilité des biens de la terre, surtout pour la famille Morville. Une créature aussi douce et aussi pure qu’Amable Edmonstone pourrait-elle donc vivre dans ces sombres murailles ? Peut-être viendrait-elle les embellir, pour un temps, de sa présence, puis