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qu’il était bien mieux qu’il n’avait été. Ensuite elle se désola de ce que ses manières avec elles étaient si changées, si froides. Sans doute c’est qu’il ne l’aimait plus autant ; cette profonde mélancolie en était la preuve. Laura ne savait ce qu’elle serait devenue dans ces tristes moments, sans la présence de sa sœur, qui la consolait un peu. Cette chère sœur pouvait bien la comprendre ; elle aussi connaissait la douleur ! Mais Laura lui portait presque envie, parce que la mort seule avait pu lui enlever son bien-aimé. Elle avait un autre sujet de l’envier, c’est qu’Amable n’avait pas empoisonné elle-même la coupe de ses douleurs.

Les deux sœurs demeurèrent ensemble jusqu’au moment où Charlotte vint avertir Laura que le thé était prêt, ajoutant que son père et Philippe étaient encore dans la salle à manger.

Ils y demeurèrent longtemps au coin du feu, sans que ni l’un ni l’autre osât commencer. M. Edmonstone était irrésolu ; Philippe s’efforçait de contenir ses sentiments, et luttait contre son mal de tête et la confusion de ses idées, qui menaçait de lui faire oublier ce qu’il avait à dire. Enfin M. Edmonstone se leva et prit une lumière :

— Venez dans mon cabinet, dit-il ; je vous remettrai les papiers de Redclyffe.

— Merci, dit Philippe, se levant aussi, mais seulement parce qu’il ne pouvait pas demeurer assis quand son oncle était debout. Pas ce soir, s’il vous plaît ; je ne suis pas en état de les voir.