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MÉMOIRES DE HIOUEN-THSANG, L. I.

dragons se métamorphosèrent et s’accouplèrent avec des juments. Elles mirent bas des poulains qui tenaient de la nature du dragon. Ils étaient méchants, emportés et difficiles à dompter ; mais les rejetons de ces poulains-dragons devinrent doux et dociles. C’est pourquoi ce royaume produit un grand nombre d’excellents chevaux. Si l’on consulte les anciennes descriptions de ce pays, on y lit ce qui suit : « Dans ces derniers temps, il y avait un roi surnommé Fleur d’or, qui montrait, dans ses lois, une rare pénétration. Il sut toucher les dragons et les atteler à son char. Quand il voulait se rendre invisible, il frappait leurs oreilles avec son fouet et disparaissait subitement. Depuis cette époque, jusqu’à ce jour, la ville ne possède point de puits, de sorte que les habitants vont prendre dans le lac l’eau dont ils ont besoin. Les dragons s’étant métamorphosés en hommes, s’unirent avec des femmes du pays, et ils en eurent des enfants forts et courageux, qui pouvaient atteindre, à la course, les chevaux les plus agiles. Ces relations s’étant étendues peu à peu, tous les hommes appartinrent bientôt à la race des dragons ; mais, fiers de leur force, ils se livraient à la violence et méprisaient les ordres du roi. Alors le roi, ayant appelé à son aide les Tou-kioue (Turcs), massacra tous les habitants de cette ville, depuis les enfants jusqu’aux vieillards, et n’y laissa pas un homme vivant. Maintenant, la ville est complètement déserte, et l’on n’y aperçoit nulle habitation. » À environ quarante li au nord de cette ville, sur les flancs de deux montagnes voisines que sépare une ri-