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VOYAGES DES PÈLERINS BOUDDHISTES.

lui, elle se métamorphosa et prit une forme humaine ; puis elle le toucha doucement. Celui-ci se réveilla en sursaut, et lui adressa aussitôt ses remercîments. « Je ne suis, dit-il, qu’un pauvre voyageur exténué de fatigue ; comment daignez-vous vous attacher à moi ? » Bientôt après, il lui témoigna une vive affection et la pressa de s’unir à lui au milieu des champs[1]. « Mon père et ma mère, lui répondit la jeune fille, m’ont donné leurs instructions, et j’y obéis avec respect. Quoique j’aie eu le bonheur d’être accueillie par vous avec une extrême bienveillance, je n’ai pas encore reçu les ordres souverains de mes parents. »

— Les montagnes et les vallées, reprit le descendant de Çâkya, nous couvrent de leur ombre. Où est située votre maison ? — « Je suis, dit-elle, la fille du dragon de cet étang. J’ai appris, avec respect, que les membres de votre famille sainte errent dispersés pour échapper à la mort. Heureusement qu’en me promenant, j’ai osé vous offrir des consolations et adoucir vos fatigues. Vous m’avez ordonné ensuite de répondre en secret à votre amour ; mais je ne sais pas encore quelles seront les volontés de mes parents. Ajoutez à cela que, pour avoir accumulé le malheur sur ma tête, j’ai reçu ce corps de dragon. Les hommes et les animaux ont des voies différentes ; je n’ai jamais entendu dire qu’une telle union fût possible. »

  1. L’expression ye-ho « champs-s’unir », implique l’idée de s’unir d’une manière immorale, et sans observer les usages prescrits pour la légalité du mariage.