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Alors Sotéridas de Sicyone : « La partie n’est pas égale, Xénophon : tu galopes sur un cheval, et moi, je peine rudement à porter un bouclier. » Xénophon l’entend, saute de cheval, pousse le soldat hors du rang, lui arrache son bouclier, et s’élance de toute sa vitesse. Il se trouvait avoir une cuirasse de cavalier : le poids l’écrasait ; cependant il fait avancer la tête, et entraîne la queue qui marchait lentement. Les autres soldats frappent Sotéridas, lui jettent des pierres, l’injurient, jusqu’à ce qu’ils l’aient contraint à reprendre son bouclier et à marcher. Xénophon remonte sur son cheval, et s’en sert tant que le chemin est praticable ; puis, quand il cesse de l’être, il quitte son cheval et marche vite à pied. On arrive enfin sur la hauteur avant les ennemis.


CHAPITRE V.


Incendie des villages par Tissapherne. — Les Grecs sont enfermés entre les monts des Carduques et le Tigre. — Difficulté de passer le fleuve. — Expédient proposé par un Rhodien. — On se décide à franchir les monts Carduques.


Les Barbares tournent le dos et s’enfuient chacun comme il peut ; les Grecs sont maîtres de la hauteur. Tissapherne et Ariée prennent alors un autre chemin. De son côté, Chirisophe descend dans la plaine avec ses troupes et campe dans un village abondant en biens. Il y avait dans la même plaine, le long du Tigre, beaucoup d’autres villages bien approvisionnés. L’après-midi venue, l’ennemi paraît à l’improviste dans la plaine et taille en pièces quelques Grecs, qui s’étaient dispersés pour piller. Il y avait là, en effet, un grand nombre de troupeaux qu’on prit au moment où ils allaient passer le fleuve.

Alors Tissapherne et ses gens ayant essayé de mettre le feu aux villages, quelques Grecs sont désespérés, dans la crainte de ne plus trouver où se fournir de vivres, si les Barbares viennent à tout brûler. En ce moment, Chirisophe et les siens revenaient de porter secours. Xénophon, redescendu dans la plaine, se met à parcourir les rangs et dit aux Grecs qui revenaient de porter secours : « Vous voyez, Grecs, que les Barbares regardent déjà cette contrée comme à nous. Ils avaient stipulé que nous ne brûlerions pas les terres du roi, et ce sont eux maintenant qui les brûlent comme pays qui ne leur appartient plus. Mais, en