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ferez mal. Rappelez-vous ce que disait Socrate, et cherchez à l’imiter dans ses habitudes et dans ses paroles. En prolongeant votre douleur, vous vous nuirez beaucoup à vous et à vos enfants. Les fils de Socrate sont encore bien jeunes, et nous ne devons pas seulement les nourrir, mais nous efforcer de leur rester. Si vous, si moi, si quelqu’un de ceux qui s’intéressent aux fils de Socrate qui n’est plus, nous venions à mourir, quelle perte pour eux, quand ils n’auraient plus là personne pour leur venir en aide et les élever convenablement ! Consentez donc à vivre pour vos enfants. Or, cela ne peut être que si vous vous procurez des moyens d’existence. La douleur semble être l’opposé de la vie, quand ceux qui vivent s’en laissent accabler.

Apollodore, surnommé le débonnaire[1], et Dion, vous félicitent de ne vouloir rien accepter de personne et de dire que vous êtes riche. Vous faites bien. Tant que moi et vos autres amis nous serons en état de vous venir en aide, vous ne manquerez de rien. Courage donc, Xanthippe ; restez fidèle aux beaux principes de Socrate, convaincue que c’était quelque chose de bien grand qu’un pareil homme. En pensant à lui, songez comme il a vécu, et non comme il est mort. Pour moi, j’ai la conviction que sa mort a été grande et belle, quand on la considère du point de vue réel. Bonne santé.



V[2]


Xénophon à Cébès et à Simmias[3].


On dit vrai, il n’y a rien de plus riche qu’un pauvre. Il va m’arriver, je le vois, que n’ayant rien, je vais avoir beaucoup par vous, mes amis, qui prenez soin de nous. Vous feriez une belle œuvre, si, quand je vous écrirai sur un certain sujet, vous me faisiez réponse. Mes écrits historiques n’en sont pas encore à un tel point, que j’ose les montrer à un autre sans que je sois là ; mais si vous étiez chez moi, où Euclide se trouve

  1. Voy. III, II, et Apolog., III.
  2. C’est la XXIIe des Épîtres socratiques,
  3. Célèbres disciples de Socrate, dont il est question dans les Mémoires, dans l’Apologie, et dans les œuvres de Platon.