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CHAPITRE III.



Lenteurs de la justice. — Pouvoir de l’argent. — Difficulté de maintenir la démocratie. — Sympathie des Athéniens pour la populace révolutionnaire.



Ainsi, je n’approuve pas la constitution des Athéniens ; mais, puisqu’il leur a plu d’être en démocratie, ils ont bien fait, à mon sens, de conserver l’état démocratique de la manière dont je l’ai exposé. Je vois d’ailleurs des gens qui blâment les Athéniens de ce que parfois un particulier, qui veut y présenter une requête au sénat ou au peuple, attend une année entière. Cela n’arrive à Athènes qu’en raison de la multitude des affaires, qui empêche de donner audience à tout le monde. Et comment le pourraient-ils, eux qui ont d’abord plus de fêtes à célébrer que toute autre ville grecque, et par conséquent moins de temps pour expédier les affaires publiques ? Ils ont ensuite des procès, des actes d’accusation, des comptes de gestion à plaider plus que n’en plaident tous les hommes réunis. Et le sénat, combien de délibérations sur la guerre, combien sur les finances, combien sur les lois, combien sur les affaires journalières de la cité, combien à propos des alliés, sans compter la perception des impôts, le soin des arsenaux et des temples ! Est-il étonnant qu’au milieu de ce concours, on ne puisse répondre à toutes les requêtes[1] ?

Mais, disent quelques-uns, quand on se présente l’argent en main au sénat ou au peuple, il vous écoute. J’en conviens ; avec

  1. « Quelque prodigieux que pût être le nombre des juges qui remplissaient les tribunaux d’Athènes, Xénophon observe qu’il ne leur était pas possible de terminer toutes les affaires dans le cours de douze mois, parce que chez eux le calendrier contenait trop de jours de fête, pendant lesquels on fermait les cours de justice. D’un autre côté, toutes les villes et toutes les îles tributaires devaient venir plaider en dernier ressort devant quelque tribunal d’Athènes. Or, précisément ces îles-là, telles que Samos, lmbros, Lemnos, Délos, Paros et d’autres, n’étaient habitées que par des peuples appliqués à la navigation et au commerce, qu’on doit envisager comme deux sources intarissables de contestations parmi les Grecs. — Il existait sur la côte d’Asie une ville nommée Phasélie, dont les négociante étaient, sans exception, les hommes les plus turbulents et les plus injustes de la terre : dès qu’ils abordaient an Pirée, ils intentaient une action, soit à des banquiers, soit à des patrons de navires, » De Pauw, t. II, p. 27 et 28.