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Il a d’ailleurs imposé la nécessité absolue de pratiquer toutes les vertus civiles : car il a voulu que tous ceux qui satisfont à la loi, sans distinction, fussent admis à tous les droits de citoyens, et il n’a tenu compte ni de la différence de fortune, ni de la faiblesse du corps. Seulement, tout homme qui, par lâcheté d’âme, se soustrait aux exigences de la loi, il le déclare placé hors de la loi d’égalité.

Quant à l’antiquité reculée de cette législation, elle est évidente, puisque Lycurgue, dit-on, était contemporain des Héraclides[1]. Cependant, malgré cette antiquité, elles ont encore un air de nouveauté aux yeux des autres peuples ; et, chose des plus étranges, tout le monde loue ces institutions, mais les imiter, aucune cité ne le veut.



CHAPITRE XI.


De l’armée lacédémonienne.


Ces lois excellentes sont communes à la paix et à la guerre ; mais, si l’on désire connaître ce que Lycurgue a créé de supérieur aux autres législations en fait d’organisation militaire, on peut en juger par ce qui suit.

D’abord les éphores font publier par un héraut l’âge auquel doivent servir soit les cavaliers et les hoplites, soit les artisans attachés à l’armée ; ce qui fait que toutes les ressources de la ville, les Lacédémoniens les ont à leur portée dans les camps : tous les instruments d’utilité générale qui peuvent y être nécessaires, il est enjoint de les y apporter ou sur des chariots, ou sur des bêtes de somme ; c’est le moyen de ne jamais ignorer ce qui manque.

Quant à l’uniforme sous les armes, voici ce que Lycurgue a imaginé : chacun doit avoir une casaque rouge et un bouclier d’airain[2] ; il a cru qu’une partie de cette armure se rapprochait moins du vêtement des femmes, et que l’autre était bien faite

  1. De Pauw est loin de croire à cette assertion. Voy. Rech. philosoph. t. II, p. 378 et suivantes. Fr. Haase lui-même ne disconvient point que les traditions relatives à Lycurgue ne soient pleines de fables. En général, on fixe l’époque où vécut Lycurgue vers l’an 898 avant J. C.
  2. Passage controversé : Fr. Haase nous a servi de guide. Cf. pour l’armure des Lacédémoniens, de Pauw, t. II, ρ 297 et suivantes