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Je crois aussi devoir parler des amours des garçons, point qui rentre dans l’éducation des enfants. Chez quelques peuples de la Grèce, comme chez les Béotiens, un homme fait se lie d’un commerce intime avec un garçon, ou bien, comme chez les Éléens, c’est par des présents qu’on obtient les faveurs de la jeunesse ; ailleurs, il n’est pas même permis aux soupirants d’adresser la parole aux garçons. Lycurgue avait encore sur cet objet des principes opposés. Quand un homme comme il faut, épris de l’âme d’un garçon, aspirait à s’en faire un ami sans reproche et à vivre près de lui, il l’encourageait et estimait cette société belle entre toutes. Mais quiconque ne semblait épris que du corps, il le déclarait infâme ; et il fit ainsi qu’à Lacédémone les amants ne s’abstenaient pas moins d’un commerce amoureux avec les garçons que les parents avec leurs enfants, les frères avec leurs frères. Je ne suis pas surpris que certains ne veuillent pas me croire ; car il est beaucoup de villes où les lois ne condamnent point cet amour des garçons.

Voilà ce que j’avais à dire de l’éducation des enfants à Sparte et chez les autres Grecs. Lequel de ces deux systèmes produit-il des hommes plus soumis, plus respectueux, plus maîtres de leurs désirs ? Décide qui voudra.



CHAPITRE III.


Éducation de la jeunesse.


Quand les enfants passent de l’enfance à l’adolescence[1] l’usage des autres Grecs est alors de les retirer des mains des pédagogues et des maîtres, de ne plus leur imposer aucune autorité, et de les laisser indépendants. Lycurgue a suivi une tout autre méthode. Persuadé qu’à cet âge on a une forte dose de vanité, d’insolence qui déborde, de passion désordonnée pour les plaisirs, il lui a imposé, pour ce moment même, de nombreux travaux, et il a imaginé mille moyens de l’occuper. De plus, en prescrivant que quiconque se dispenserait de ces exercices serait exclu des hautes fonctions, il a rendu non-

  1. À dix-huit ans