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qu’on se sente frappé d’étonnement à la vue d’une si grande pompe, et que Cyrus impose par sa grandeur et sa bonne mine. Jusque-là, du moins, jamais Perse ne s’était prosterné devant Cyrus.

Dès que le char est sorti du palais, les quatre mille doryphores se mettent en marche, deux mule de chaque côté du char. Ils sont suivis d’environ trois cents porte-sceptres à cheval, richement vêtus et armés de dards : après eux on mène en main près de deux cents chevaux des écuries de Cyrus, ornés de freins d or, et couverts de housses rayées ; ils sont suivis de deux mille xystophores[1] ; puis vient le plus ancien corps de cavalerie perse, au nombre de dix mille, sur cent de front et cent de hauteur : à leur tête est Chrysantas ; après eux tient un second corps de dix mille autres cavaliers perses, dans le même ordre, commandés par Hystaspe ; puis un troisième de pareil nombre, sous la conduite de Datamas, et un quatrième sous celle de Gadatas. Enfin arrivent les cavaliers mèdes, puis les Arméniens, les Cadusiens, les Saces. Derrière la cavalerie sont les chars, rangés sur quatre de front, et conduits par le Perse Artabase.

Tandis que Cyrus s’avance dans cet ordre, une grande foule le suit en dehors des deux haies. Comme on lui présente les uns une supplique, les autres une autre, il envoie dire par ses porte-sceptres, qui se tenaient toujours au nombre de trois ou quatre de chaque côté de son char pour porter ses ordres, de s’adresser à ses hipparques, qui lui rendraient compte des demandes. Aussitôt la foule se replie vers la cavalerie, et chacun se demande à qui il doit s’adresser. Alors Cyrus mande, l’un après l’autre, ceux de ses amis dont il veut augmenter la considération, et leur dit : « Si ces gens qui nous suivent viennent vous faire des demandes qui ne vous agréent point, n’y faites pas attention ; mais, si elles sont justes, communiquez-les-moi, afin que nous avisions ensemble au moyen d’y satisfaire. » Ceux qu’il fait appeler ainsi accourent à lui au grand galop, et leur promptitude à obéir ajoute encore à l’éclat de sa puissance. Daïpharne seul, homme d’un caractère brusque, s’imagine qu’en obéissant moins vite il se donnera un air d’indépendance ; Cyrus le remarque, et, avant que Daïpharne se soit approché de son char, il lui envoie dire par un porte-sceptre qu’il n’a pas besoin de lui : il ne le demanda jamais depuis. Un autre, qui

  1. Porteurs de piques, piquiers.