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gens du roi passèrent du côté de Cyrus ; et parmi eux des hommes que le roi aimait réellement, mais qui croyaient que leur bravoure serait mieux récompensée par Cyrus que par le roi. La mort de Cyrus fournit encore une plus grande preuve et qu’il était personnellement bon, et qu’il savait distinguer sûrement les hommes fidèles, dévoués, constants. Quand Cyrus fut tué, tous ses commensaux périrent en combattant à ses côtés. Ariée seul lui survécut, parce qu’il commandait alors la cavalerie de l’aile gauche. Dès qu’il apprit que Cyrus était tombé, il s’enfuit avec les troupes barbares placées sous ses ordres.


CHAPITRE X.


Artaxercès s’empare du camp de Cyrus. — Il rallie ses troupes contre les Grecs, qui le mettent en déroute.


On coupa, sur le lieu même, la tête et la main droite de Cyrus. Le roi et sa troupe, poursuivant les fuyards, entrent dans le camp de Cyrus. Ariée et ses gens ne font aucune résistance : ils s’enfuient du camp à l’étape d’où ils étaient partis, et qui était, dit-on, à quatre parasanges. Le roi et sa troupe mettent tout au pillage et prennent la maîtresse de Cyrus, une Phocéenne que l’on disait sage et belle[1]. Une Milésienne, plus jeune que l’autre[2], prise par les soldats du roi, s’enfuit nue du côté des Grecs, qui étaient commis à la garde des armes avec les skeuophores ; ils se forment pour résister, tuent bon nombre des pillards, et perdent aussi quelques-uns des leurs ; mais ils ne quittent point leur poste, et sauvent non-seulement la jeune femme, mais tout ce qui se trouve dans leur quartier, hommes et bagages.

Il y avait alors entre le roi et les Grecs une distance d’environ trente stades : les uns poursuivant ce qui était devant eux comme s’ils avaient tout vaincu ; les autres pillant, comme s’ils étaient tous vainqueurs. Mais les Grecs, s’aperçoivent que le roi avec sa troupe tombait sur les skeuophores, et le roi ap-

  1. Elle s’appelait d’abord Milto ou Myrto, nom qu’elle avait échangé pour celui d’Aspasie. Voy. le portrait flatteur qu’en a tracé Élien, Hist. diverses, XII, I. Cf. Plutarque, Vie d’Artaxercès, vers la fin.
  2. On ignore le nom de cette Milésienne.