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dats ne sauraient atteindre l’ennemi avec leurs armes, puissent être d’un grand secours aux leurs et faire bien du mal au parti opposé ? Pour ma part, je voudrais que leurs hoplites, au lieu d’être sur cent, fussent sur dix mille de hauteur : nous aurions affaire à beaucoup moins d’hommes. Quant à nos troupes, par la profondeur que je leur donne, j’estime qu’elles seront toutes en action, toutes en état de se prêter un mutuel secours. Derrière les thoracophores, je placerai les acontistes, et après ceux-ci les archers. Qui, en effet, placerait en première ligne des corps qui conviennent eux-mêmes qu’ils ne sont pas propres à un combat de près ? Seulement, couverts par les thoracophores, ils tiendront ferme, et, par leurs traits et leurs flèches ils incommoderont les ennemis en tirant par-dessus les premiers rangs. Du moment qu’on fait du mal aux ennemis, il est clair que, quel que soit le moyen, on vient en aide à ses alliés. Je placerai en dernière ligne ce qu’on appelle la réserve. Comme une maison n’est d’aucun usage si les fondements et le toit n’en valent rien, de même une armée devient inutile, si les premiers et les derniers rangs ne sont composés de bons soldats. Mettez-vous donc en bataille comme je le prescris : vous, chefs des peltastes, placez vos loches derrière le premier rang, et vous, chefs des archers, derrière les peltastes ; toi, chef de la réserve, qui occupes la dernière ligne, recommande à chacun de tes hommes d’observer le mouvement de la file qui sera devant lui, d’encourager ceux qui feront leur devoir, et de contenir les lâches par de terribles menaces. Si quelqu’un tourne le dos pour trahir, qu’on le tue. C’est à ceux qui sont au front de l’armée d’animer ceux qui les suivent de la parole et de l’exemple ; mais vous qui êtes aux derniers rangs, vous devez être plus redoutables aux lâches que l’ennemi même. Agissez tous ainsi. Toi, Euphratas, qui veilles aux machines, fais en sorte que nos tours roulantes suivent la phalange d’aussi près que possible. Toi, Daouchus, qui commandes les skeuophores, fais avancer toute ta troupe derrière les tours : ordonne à tes gens de punir rigoureusement quiconque avancera hors de son rang ou demeurera en arrière. Toi, Cardouchas, qui conduis les chariots des femmes, fais-les placer derrière les skeuophores. Cette longue file de chariots qui nous suivra, en grossissant l’apparence de notre armée, nous fournira aussi le moyen de tendre quelque piège à l’ennemi : s’il veut nous envelopper, il sera forcé de se déployer sur un plus grand cercle, et plus il embrassera de terrain, plus il s’affaiblira. Voila ce que vous avez à