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ner à chaque paire de bœufs que le poids de quinze talents. Quand Cyrus est sûr de la facilité de transporter ces tours, il décide d’en avoir à la suite de son armée, persuadé qu’à la guerre prendre avantage, c’est tout à la fois justice, salut et prospérité.


CHAPITRE II.


Arrivée des envoyés indiens. — Activité de Cyrus à exercer ses soldats. — Récit des envoyés indiens. — Crainte des Perses dissipées par Cyrus et par Chrysantas. — On se décide à marcher aussitôt contre l’ennemi.


Dans ce même temps, arrivent les envoyés indiens qui apportent de l’argent et adressent ce discours à Cyrus de la part du roi des Indes : « Je suis fort aise, Cyrus, que tu m’aies instruit de tes besoins ; je veux être ton hôte, et je t’envoie de l’argent. Si tu en as besoin d’autre, envoie m’en demander ; mes députés ont ordre d’obéir à quoi que tu leur commandes. » Cyrus, après les avoir entendus, leur répond : « J’ordonne donc qu’un certain nombre d’entre eux restent dans les tentes pour garder l’argent et pour vivre le plus agréablement possible, et que trois passent chez l’ennemi sous prétexte d’alliance avec l’Indien, mais, en réalité, pour savoir ce qu’il dit, ce qu’il fait, et pour nous en informer au plus vite, moi et l’Indien. Si vous vous acquittez bien de cette mission, je vous en saurai plus de gré encore que de l’argent que vous m’apportez : car mes espions, déguisés en esclaves, ne peuvent nous apprendre que ce que tout le monde sait ; mais des gens comme vous devinent souvent les résolutions intimes. » Les Indiens accueillent volontiers cette proposition ; Cyrus les traite en vrais hôtes ; et, quand ils ont tout préparé pour le voyage, ils partent le lendemain, avec promesse de revenir aussitôt qu’ils se seront instruits de leur mieux de la situation des ennemis.

Cependant Cyrus fait les préparatifs de guerre largement et en homme qui n’a pas de médiocres desseins. Il ne se borne pas aux moyens approuvés par les alliés, il excite encore entre des amis la rivalité d’avoir de plus belles armes, d’être plus fort à cheval, au trait, à l’arc, à la fatigue : il y réussit, en les conduisant à la chasse, et en récompensant ceux qui se distinguent