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Grecs à dos et ne les taille en pièces, pique à lui, et, chargeant avec ses six cents cavaliers, replie tout ce qui est devant le roi et met en fuite les six mille hommes : on dit même qu’il tue de sa propre main Artaxercès, qui les commandait[1].

La déroute une fois commencée, les six cents cavaliers de Cyrus se dispersent et s’élancent à sa poursuite, sauf quelques-uns qui demeurent auprès de lui, presque tous uniquement ceux qu’on appelle commensaux. Étant au milieu d’eux, il aperçoit le roi et le groupe qui l’entoure ; il ne peut se contenir : « Je vois l’homme, » s’écrie-t-il ; il se précipite sur lui, le frappe à la poitrine et le blesse à travers sa cuirasse, comme l’atteste le médecin Ctésias, qui prétend avoir guéri la blessure ; mais au moment même où il porte le coup, on ne sait qui l’atteint au-dessus de l’œil d’un javelot lancé avec force[2]. Dans ce combat entre le roi, Cyrus et ceux de leur suite, on sait combien il périt de monde autour du roi, par le témoignage de Ctésias, qui était auprès de lui. Cyrus y fut tué, et, sur son corps, huit de ses premiers officiers. Artapatès, dit-on, le plus dévoué de ses porte-sceptres, voyant Cyrus à terre, saute de son cheval et se jette sur le corps de son maître : le roi, assure-t-on, l’y fait égorger ; d’autres disent qu’il s’égorgea lui-même, après avoir tiré son cimeterre : car il en avait un à poignée d’or, et portait un collier, des bracelets et autres ornements, ainsi que les premiers des Perses : Cyrus l’avait en estime pour son dévouement et sa fidélité.

  1. Voy. dans Plutarque le récit du combat de Cyrus et d’Artaxercès. Trad. d’A. Pierron, t. IV, p. 630.
  2. Plutarque, d’après Ctésias, complète, à l’endroit cité, les détails relatifs à la mort de Cyrus, sur laquelle Xénophon glisse avec une concision un peu rapide. Il est vrai que Ctésias est tombé dans une prolixité qui a fait dire spirituellement à Plutarque que « son récit est un poignard émoussé, dont il tue Cyrus à grand’peine.