Page:Xénophon - Œuvres complètes, éd. Talbot, tome 2.djvu/294

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

peltastes et archers, il leur fait ordonner d’apporter leurs armes liées et de laisser leurs chevaux auprès des tentes. Quiconque ne le fera point, sera condamné à perdre la tête sur-le-champ Le sabre au poing, les cavaliers se rangent autour du camp. Les ennemis qui ont des armes les jettent, et les apportent-dans un lieu déterminé, et alors des hommes désignés pour cet office y mettent le feu.

Cyrus n’ignorait pas que les troupes étaient venues sans apporter de quoi manger et de quoi boire, provisions sans lesquelles il est impossible de faire une expédition ou toute autre chose. Comme il songeait aux moyens de s’en procurer des meilleures, et au plus vite, il réfléchit qu’il y a de toute nécessité, dans une armée, des gens chargés du service de la tente et du soin de préparer aux soldats ce qui leur est nécessaire, quand ils y rentrent. Il juge que, selon toute probabilité, c’est surtout cette sorte de gens qu’on vient de prendre dans le camp, puisqu’ils étaient occupés autour des bagages. Il fait donc publier par un héraut que tous les pourvoyeurs se présentent sur-le-champ ; que, s’il en manque quelqu’un, il vienne alors le plus ancien de la tente ; que le manquant s’expose aux dernières rigueurs. Les pourvoyeurs, voyant leurs maîtres eux-mêmes se soumettre, obéissent promptement. Quand ils sont arrivés, Cyrus ordonne que ceux qui ont dans leur tente des vivres pour plus de deux mois, aient à s’asseoir ; puis, quand il les a vus, il donne le même ordre à ceux qui n’en ont que pour un mois ; presque tous ceux qui s’assoient se trouvent dans ce cas. Cette donnée recueillie, il leur parle ainsi : « Allons, vous autres, dit-il, si quelques-uns d’entre vous craignent les mauvais traitements, et que vous vous vouliez gagner mes bonnes grâces, ayez soin de veiller à ce qu’il y ait de préparé dans chaque tente une ration de boire et de manger du double de celles que vous fournissez aux maîtres et aux valets. Faites d’ailleurs tout ce qu’il faut pour leur donner un bon repas, car nos gens reviendront aussitôt qu’ils seront complètement vainqueurs, et ils voudront qu’on leur fournisse abondamment tout ce qui est nécessaire. Sachez donc bien que votre intérêt veut qu’ils n’aient pas à se plaindre de la réception. »

Ces gens, après avoir entendu Cyrus, s’empressent d’obéir à ses ordres. Celui-ci, appelant alors les taxiarques, leur adresse ces mots : « Mes amis, je vois qu’il ne tient qu’à nous de nous mettre à table en l’absence de nos alliés, et de profiter du boire