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Le soir même, la garde qui devait relever l’autre arrive de la ville, fantassins et cavaliers. Il lui semble que cela fait une nombreuse armée, les deux gardes se trouvant réunies, et lui-même ayant amené pour sa part beaucoup de cavaliers et de fantassins. Il songe donc que ce serait un bel exploit d’aller butiner sur le territoire médique : il pense que cette entreprise serait plus brillante qu’une chasse, et qu’il en emporterait une grande quantité de bestiaux. S’étant donc levé de bonne heure, il fait avancer son armée, laisse les fantassins réunis sur les frontières, et s’approche lui-même, avec les chevaux, des forteresses des Mèdes, suivi de ses soldats les plus nombreux et les meilleurs : là il s’arrête, afin que les gardes des Mèdes ne fassent pas de sortie sur les coureurs, et il envoie le reste, par escadrons, battre la campagne de côté et d’autre, leur recommandant de fondre sur tout ce qui se présenterait et de le lui amener. Ainsi font-ils. Astyage, averti que les ennemis sont dans le pays, part au secours de sa frontière avec les troupes qu’il avait auprès de lui. Son fils le suit avec des cavaliers rassemblés à la hâte, après l’avoir donné aux autres troupes l’ordre de venir toutes au secours. Voyant les hommes des Assyriens en bon nombre, bien rangés, et leurs chevaux immobiles, les Mèdes font halte également. Cyrus, voyant tout le monde partir en masse, part lui-même et revêt alors pour la première fois ses armes ; il n’y comptait plus, tant il avait à cœur de se voir armé. Et, en effet, ces armes étaient magnifiques ; elles lui allaient admirablement, son grand-père les ayant fait faire à sa taille. Il s’arme donc, monte à cheval et part. Astyage est tout étonné de le voir arriver, ne sachant d’après quel ordre il venait. Il lui dit cependant de rester auprès de lui.

Cyrus, voyant les nombreux cavaliers qu’il avait en face, fait cette question : « Est-ce que ce sont les ennemis, grand-père, ces gens qui se tiennent là tranquillement sur leurs chevaux ? — Oui, ce sont les ennemis, dit Astyage. — Et ceux là-bas qui galopent ? — Également. — Par Jupiter, grand-père, dit Cyrus, ce sont de pauvres gens, et montés sur de pauvres chevaux, qui nous enlèvent nos biens sous nos yeux. Il faut détacher sur eux quelques-uns d’entre nous. — Mais ne vois-tu pas, garçon, quelle longue file de cavaliers se développe pour soutenir les autres ? Si nous les attaquons, ils viendront nous couper par derrière : et nous ne sommes pas encore en force. — Mais si tu restes pour attendre le renfort, ces gens-là auront