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poissons prives ; les Syriens les regardent comme des dieux et ne permettent point qu’on leur fasse du mal, non plus qu’aux colombes[1]. Les villages où l’on dressa les tentes étaient à Parysatis : c’était un don pour sa ceinture[2]. De là, il fait trente parasanges en cinq étapes jusqu’aux sources du fleuve Dardés, large d’un plèthre. Là était le palais de Bélésis, gouverneur de la Syrie, avec un parc très-grand, très-beau, et produisant tout ce que donne chaque saison. Cyrus fait raser le parc et fait brûler le palais. Il fait ensuite quinze parasanges en trois étapes et arrive aux bords de l’Euphrate, large de quatre stades. En cet endroit est bâtie une ville grande et riche nommée Thapsaque. On y demeure cinq jours. Cyrus, ayant mandé les généraux grecs, leur dit qu’il marche contre le grand roi sur Babylone, et les prie de l’annoncer à leurs soldats, en les engageant à le suivre. Les généraux convoquent une assemblée et annoncent cette nouvelle. Les soldats s’emportent contre leurs chefs, et prétendent que, sachant depuis longtemps ce projet, ils l’ont tenu caché. Ils refusent de marcher en avant, si on ne leur donne pas autant qu’aux Grecs qui ont jadis accompagné Cyrus dans son voyage auprès de son père ; et cela, quand il ne s’agissait pas de se battre, mais d’escorter Cyrus que son père avait appelé. Les généraux : font leur rapport à Cyrus : celui-ci promet de donner

  1. Voy. Lucien, De la déesse syrienne, 14 et 45. — Cf. le même auteur, De l’astrologie, 7.
  2. « Cicéron contre Verrès, liv. III, chap. xxxiii, dit que les rois des Perses et des Syriens sont dans l’usage d’avoir plusieurs femmes, et que des villes sont attribuées à ces princesses pour fournir les unes, leur ceinture, redimiculum, d’autres leur voile, d’autres leurs colliers, d’autres les ornements de leur tête. Hérodote, Euterpe, chap. xcviii, parle d’une ville d’Égypte donnée à perpétuité aux reines de ce pays pour leur chaussure. Il ajoute que cet ouvrage subsiste depuis la conquête de l’Égypte par les Perses. Athénée, liv. I, chap. xxv, cite la même ville comme donnée successivement par tous les souverains de ce pays, soit Perses, soit Égyptiens, aux reines d’Égypte. Plusieurs autres nous apprennent que Xerxès fit don à Thémistocle, lorsqu’il se réfugia en Asie, de trois villes dont l’une devait fournir le pain, une autre le vin et la troisième les mets de sa table. Mais le passage de Platon, Alcibiade Ier, p. 123, confirme encore plus positivement la conjecture de Muret et de Lengerman. Platon assure que l’on tenait d’un homme digne de foi, qui avait été à la cour de Perse, qu’il avait employé un jour presque entier à traverser un pays vaste et fertile, que les habitants appelaient la ceinture de la reine (c’est probablement celui dont parle ici Xénophon, car il se trouve sur la route d’un Grec allant à Babylone) ; qu’un autre territoire s’appelait le voile de la reine, et qu’enfin différents lieu, beaux et d’un grand revenu, portaient chacun le nom de divers ornements de cette princesse, auxquels ils étaient affectés. Tel était l’usage des Perses. » De la Luzerne.