Page:Xénophon - Œuvres complètes, éd. Talbot, tome 2.djvu/182

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.


Cependant Xénophon réfléchissait aux moyens de porter plus loin la guerre dans le haut pays ; mais Héraclide présente les autres stratèges à Seuthès, et les presse d’assurer qu’ils conduiront tout aussi bien l’armée que Xénophon ; il leur promet vous peu de jours la solde entière de deux mois et les engage à marcher en avant. Timasion répond : « Pour moi, quand même la solde devrait être de cinq mines, je ne marcherai pas sans Xénophon. » Phryniscus et Cléandre font la même réponse que Timasion.

Alors Seuthès reproche à Héraclide de n’avoir pas appelé Xénophon : ils le font venir seul. Xénophon, devinant la fourberie d’Héraclide, qui voulait le calomnier auprès des autres stratèges, amène avec lui tous les stratèges et les lochages. Seuthès les convainc tous : on part et on marche, ayant à droite le Pont, à travers le pays des Thraces mélinophages, et l’on arrive à Salmydesse[1]. Beaucoup de bâtiments qui entrent dans l’Euxin touchent et s’engravent en cet endroit : la mer y est pleine de bas-fonds. Les Thraces habitants de ces parages, ont fait des colonnes de démarcation entre lesquelles chacun pille ce qui échoue sur sa côte. On prétend qu’avant l’établissement de ces limites, bon nombre de ces pillards s’entre-tuaient. Là on trouve beaucoup de lits, beaucoup de coffres, beaucoup de livres et beaucoup de tous ces objets que les matelots transportent dans des caisses de bois. La contrée soumise, on revient sur ses pas. Seuthès avait alors une armée plus nombreuse que celle des Grecs. Il lui était venu des montagnes une plus grande quantité d’Odryses qu’auparavant, et tous ceux qu’il soumettait se joignaient successivement à lui. On campe dans une plaine au-dessus de Sélybrie, à trente stades environ de la mer. De solde, nulle apparence. Les soldats sont tous furieux contre Xénophon, et Seuthès, de son côté, ne le traite plus avec la même intimité. Toutes les fois que Xénophon veut aller le voir, celui-ci prétexte de grandes occupations.

  1. Selon Weiske, l’endroit nommé Salmydesse était une partie du littoral entre Byzance et Apollonie. D’autres savants croient que c’est une ville.