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les villages où des gens moins nombreux nous en laisseront prendre, et que là nous écoutions ce qu’on nous demande, afin de choisir ce que nous croirons le meilleur. Que quiconque pense comme moi lève la main. » Tout le monde la lève, « Allez donc faire vos préparatifs, et, quand vous en recevrez l’ordre, suivez votre chef. »

Xénophon se met alors à leur tête : ils suivent. Néon et d’autres envoyés d’Aristarque engagent les troupes à revenir sur leurs pas : on ne les écoute point. Quand on a fait une trentaine de stades, on rencontre Seuthès. Xénophon, l’apercevant, le prie d’approcher, afin qu’un plus grand nombre entende ce qui a trait à l’intérêt de tous. Il s’avance, et Xénophon lui dit : « Nous allons où l’armée pourra trouver de la subsistance : là nous écouterons tes propositions et celles du Lacédémonien, et nous choisirons ce qui nous paraîtra le meilleur. Si tu nous conduis où il y a abondance de vivres, nous nous croirons liés à toi par des liens hospitaliers. » Seuthès répond : « Mais je connais de nombreux villages qui se touchent et qui abondent en provisions i ils ne sont de nous qu’à la distance nécessaire pour mieux dîner. — Eh bien, dit Xénophon, il faut nous y conduire. » On y arrive l’après-dînée ; les soldats s’assemblent, et Seuthès leur dit : « Soldats, je viens vous prier de faire la guerre à mon service : je vous promets que je vous donnerai par mois un statère de Cyzique, et aux lochages ainsi qu’aux stratèges ce qui est d’usage. Mais, en outre, je payerai suivant les mérites. Le manger et le boire, vous le tirerez, comme aujourd’hui, du pays : quant au butin, il m’appartiendra, afin que je le fasse vendre pour vous payer votre solde. Nous sommes en état de poursuivre et de dépister ce qui fuit et se cache : ceux qui nous résisteraient, nous essayerons avec vous de les soumettre. » Xénophon lui demande : « Jusqu’à quelle distance de la mer prétends-tu que l’armée te suive ? » Seuthès répond : « Jamais à plus de sept journées, souvent à moins. »

On permet alors à qui veut de prendre la parole. Beaucoup disent que Seuthès fait des propositions convenables : on est en hiver ; ceux qui veulent retourner dans leur patrie ne le peuvent pas ; il est également impossible de rester en pays ami, n’ayant pas pour acheter de quoi vivre : cantonner et se nourrir en pays ennemi est moins sûr tout seuls qu’avec Seuthè, qui offre tant de ressources ; toucher une solde, c’est à leurs yeux une vraie trouvaille. Xénophon dit alors : « Si quel-