Page:Xénophon - Œuvres complètes, éd. Talbot, tome 1.djvu/602

Cette page a été validée par deux contributeurs.

troupes d’Ischolaüs conservent l’avantage tant qu’elles n’ont des ennemis qu’en face ; mais lorsque ceux-ci arrivent par derrière et sur les flancs, et que, montant sur les maisons, ils les accablent de coups et de traits, Ischolaüs et tous les siens sont massacrés, à l’exception de quelques-uns qui parviennent à s’échapper sans être reconnus. Après s’être ainsi frayé le passage, les Arcadiens marchent sur Caryes pour s’unir aux Thébains. Les Thébains, apprenant le succès des Arcadiens, sont beaucoup plus audacieux à descendre dans la plaine, et ils commencent par brûler et saccager Sellasie. Arrivés dans la plaine, sur le territoire consacré à Apollon, ils y placent leur camp, et le lendemain ils poursuivent leur marche. Ils ne se hasardent point à traverser le pont pour marcher sur la ville, parce qu’on voyait vis-à-vis des hoplites, dans le temple d’Aléa[1] ; mais, tenant l’Eurotas sur leur droite, ils s’avancent, brûlant et saccageant des habitations remplies de richesses considérables.

Quant à ceux de la ville, les femmes ne peuvent supporter la vue de la fumée, n’ayant jamais aperçu d’ennemis[2] ; et les Spartiates, dont la ville est sans murailles, sont postés çà et là pour la défendre, sans pouvoir dissimuler le petit nombre d’hommes qu’ils ont en réalité. Les magistrats décident d’annoncer aux hilotes que tous ceux qui voudront prendre les armes et se mettre en rang, recevront l’assurance d’être mis en liberté, s’ils s’unissent aux citoyens pour combattre. On dit qu’il s’en inscrivit d’abord plus de six mille, de sorte que ces gens réunis inspirèrent une nouvelle crainte et qu’on les trouva trop nombreux. Mais cependant, comme les mercenaires d’Orchomène restaient à Sparte, et que les Lacédémoniens reçurent des secours des Phliasiens, des Corinthiens, des Épidauriens, des Pelléniens et de quelques autres cités encore, on commença à n’avoir plus une si grande peur des hilotes inscrits.

Quand l’armée ennemie s’est avancée jusqu’à Amyclée, elle y passe l’Eurotas. Les Thébains, partout où ils campent, commencent par couper les arbres, les jettent en avant de leurs lignes en aussi grand nombre que possible, et se tiennent ainsi sur leurs gardes. Les Arcadiens ne font rien de tout

  1. Surnom de Minerve. Voy. ce mot dans le Dict. de Jacobi.
  2. Depuis plus de six cents ans il n’y avait pas eu d’invasion en Laconie. Cf. Plutarque, Agésilas, xxx.